L’angoisse est le vertige de la liberté.
Sören Kierkegaard - Le concept d’angoisse
Que n’a-t-on pas dit de cette phrase de Kierkegaard ? Sartre aurait même écrit la Nausée rien que pour en illustrer la pensée. Je n’en crois rien, mais reste l’idée que l’angoisse est un vertige issu de la gratuité de l’acte libre : je peux tout faire puisque je suis libre, y compris me jeter dans le vide. Ce vide, c’est en réalité celui des valeurs qui ne peuvent plus me servir de guide puisqu’elles n’existent que par mon choix. Le vertige, ce n’est rien d’autre que d’être dans un espace sans repères.
La liberté serait-elle angoissante ? Faut-il donc rechercher la contrainte et être comme les enfants qu’on conduit en lisère (1) ?
On a vu qu’en réalité ce sont les conditions de la liberté qui sont source d’angoisse : pas de repères, qui signifieraient contrainte. Je suis seul à décider de ce qu’ils doivent être, et j’en suis responsable par rapport au reste de l’humanité (thèse de Sartre, déjà discutée ici).
Mais voilà, justement : ces repères s’ils ne sont pas donnés, peuvent être établis, par moi-même. Autrement dit, à la liberté comme libre-arbitre (= absence de contraintes) doit s’ajouter la liberté morale (= aptitude à se développer soi-même selon ses propres règles). Ce qui veut bien dire que des règles, il y en a ; mais pas tout de suite. C’est le propre de la jeunesse que d’être angoissé par sa liberté. C’est le propre de l’adulte que de savoir où il veut aller et d’y aller. C’est le propre de la vieillesse d’y être.
En espérant ne pas être déçu du voyage.
(1) Autrefois, les petits enfants étaient tenus en laisse comme les animaux. La lisère était le nom donné à cette laisse.
No comments:
Post a Comment