Le hasard gouverne un peu plus de la moitié de nos actions, et nous dirigeons le reste.
Nicolas Machiavel
Commentaire 1
- Jeune homme, vous qui rentrez de vacances, vous avez rencontré une jeune fille, et vous vous êtes aimés... Flirt de vacances ? Amour d’une vie ?
L’amour plus que toute autre circonstance a partie liée avec le hasard, et plus que tout autre il répugne au hasard.
« Nous étions faits l’un pour l’autre… » « Dans chaque fille que j’ai connue c’est un peu toi que je cherchais… » Que de bluettes on a inventées pour nier le hasard ! Comme si tout ce qui compte dans notre vie devait avoir été programmé dès son origine, tissé dans son étoffe même, comme le fil rouge dans le cordage … (1). Qu’est-ce qu’aurait été ma vie si ne s’était produit que ce que j’avais prévu (craint ou espéré, peu importe ici), et que rien ne se soit produit par chance ou par malchance ?
La banalité serait de dire que si le hasard existe, ses conséquences nous appartiennent : l’amour de vacances ne peut devenir l’amour de ma vie que si je le veux de tout mon être… C’est vrai, mais ce n’est pas ça que veut dire Machiavel : le hasard gouverne un peu plus de la moitié de nos actions : donc ce n’est pas nous ; et nous dirigeons le reste : non pas les conséquences du hasard, mais l’autre part de nos actions. Le hasard, il faut faire avec, et dans ses interventions les plus radicales (la perte accidentelle d’un ami, gagner une fortune au Loto), il n’est pas sûr qu’on parvienne à ressouder les deux parties de notre vie, l’avant et l’après, dans la mesure où justement nous ne sommes pas responsables de ce qui est arrivé.
Et pourtant c’est bien ce que nous devons faire sous peine de devenir schizophrène ; c’est d’ailleurs ce que nous enseignent les stoïciens : nous ne sommes pas l’auteur de notre existence dans la mesure où nous ne dirigeons pas tout ce qu’y produit le destin. Alors, certes le hasard n’est pas le destin, mais qu’est-ce que ça change pour nous, qui ne dirigeons de toute façon que le reste ? Ça change que nous devons aimer le destin, disent les Stoïciens ? Alors, pourquoi ne pas aimer le hasard ?
Demandez un peu à la Française des jeux ce qu’elle en pense.
(1) Le fil rouge souvent assimilé au fil conducteur était en réalité un fil tissé avec les cordages de la Royal Navy, afin qu’en cas de naufrage, un simple fragment de corde suffise à identifier l’origine de l’épave. Freud s’est abondamment servi de cette expression.
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