- Colin la prend et il l’embrase, / Et puis d’une amoureuse audace, / Il la baisa cinq ou six fois, / Reposons nous ma douce amie, / Car c’est assez pour cette fois … /
- Recommençons ma chère vie, / Recommençons je t’en
supplie, / Car à ce jeu je prends plaisir, / Pardonne-moi ma douce amie, / Car
je n’en ai plus de désir, …/
- Colin la baise et la rebaise, / Catin ne fut jamais si
aise / Quand elle vit recommencer, Lorsqu’il lui a fait la chosette / Qu’une
fille peut désirer…
Gaultier-Garguille
(1573-1633) – Chanson
Deux remarques sur le vocabulaire (début 17ème siècle) :
d’abord Catin est un terme affectueux
pour s’adresser à une fille de la campagne. Ensuite le verbe « baiser » désigne clairement l’acte sexuel ;
on pensera alors à la charge comique de la réplique de Diafoirus dans le Malade
imaginaire (1)
Pour un homme : une femme = deux problèmes
- D’abord, quand une femme dit « non », elle veut dire « oui ». Colin est
chanceux que Catin lui offre une seconde tentative. En général si l’on n’a pas
compris du premier coup, il n’y a plus qu’à aller chercher fortune ailleurs.
- Ensuite quand elle a accepté la « chosette »,
voilà qu’elle en redemande encore et encore, alors que l’homme est provisoirement
hors d’usage. C’est dans la nature des êtres, et les facultés orgasmiques
féminines peuvent laisser l’homme sur le bord de la route – en déroute.
J’ajouterai que si cette chanson du début du 17ème
siècle se permet quelques grivoiseries, elle aborde également sans détour la
sexualité féminine – ce qui peut paraitre assez audacieux. Mais que l’on songe
à Brantôme et à ses Femmes galantes (2):
ces paillardes n’hésitaient pas à tromper leur mari si le désir leur en
prenait.
Ce qui est remarquable dans cette chanson, c’est qu’on y
trouve la clé du désir féminin : à savoir, recommencer. Encore !
Voilà le véritable objet du désir. Si l’amour était un besoin, nul doute qu’il
se serait apaisé après qu’on l’ait bien fait ; c’est du reste le cas pour
l’homme. Mais la femme quant à elle, ne désire qu’une chose : « qu’on la rebaise », et cela même –
et surtout - quand ça a déjà été fait.
Voilà sans doute ce qui a fait horreur aux Saints Pères
de l’Eglises, pour lesquels la sexualité n’avait de justification que de
procréer. Quand le « vase féminin »
était rempli, il n’y avait plus qu’à se retirer.
La vase féminin ? Un vase sans fond !
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(1) « Baiserai-je, mon père ? » voir ici
(2) Voir demain
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