Imagine qu'il n'y a aucun pays, / Ce n'est pas dur à faire,
/ Aucune cause pour laquelle tuer ou mourir, / Aucune religion non plus, /
Imagine tous les gens, / Vivant leurs vies en paix...
(Imagine there's no
countries / It isn't hard to do / Nothing to kill or die for / And no religion
too / Imagine all the people / Living life in peace...)
John
Lennon – Imagine (1971)
Chanson
à lire ici – A écouter ici
Blasphème…
Religion… Laïcité…
Ces mots, parmi d’autres, saturent notre espace
d’information et de réflexion. Que dire qui n’ait été dit et répété ? Ceux
qui croient en Dieu estiment qu’Il devrait être respecté en tout lieu, et
d’abord dans l’espace public. Ceux qui défendent la laïcité sont souvent mal
compris et d’ailleurs ils ne se comprennent pas toujours entre eux :
laïcité = tolérance de toutes les religions avec leurs manifestations
spécifiques, ou bien = effacement des religions de la vie publique ?
Laissons cela de côté et allons au plus urgent : une
religion vaut-elle qu’on perde sa vie pour elle ? Mais pour répondre, il faut d'abord savoir comment évaluer la
religion ?
J’imagine que vous sursautez : comment évaluer la religion ? S’agit-il d’un blasphème de
plus ? Ou bien d’une scandaleuse prétention à se placer en surplomb du
divin, point de vue indispensable pour prétendre l’évaluer ?
« Etre en
surplomb des religions ». Ridicule fatuité de mécréant ?
Peut-être, mais une solution consiste à faire de la religion un simple cas
parmi d’autres façons de régler les rapports sociaux. C’est ce que fait la
chanson de John Lennon.
Enumérons avec lui les causes de conflits entre les
hommes :
- les
frontières qui séparent et opposent les peuples et qui leur donnent des envies
de conquête ; l’herbe est toujours plus verte de l’autre côté.
- la
transcendance des valeurs qui en dominant les hommes, en donnant le sens de
leur vie les conduisent paradoxalement à la sacrifier – la leur bien entendu,
mais aussi la vie de ceux qui refusent de s’incliner devant leur Souverain Bien.
- la
religion – pas celle qui rassemble les hommes parce qu’elle est au singulier, mais
plutôt les religions qui, devenues plurielles, leur donnent l’occasion d’étriper
les Infidèles.
Nous nous étripons les uns les autres au nom de la Patrie,
de la Morale, de la Religion – admettons que ces trois réponses n’en fassent
qu’une et que ce soit la transcendance
qui les regroupe ; crions « A bas la transcendance ! Refusons de
succomber à cette chimère ! Vivons dans l’immanence ! »
Immanence ?
Est-ce que c’est autre chose que la jouissance des biens matériels, des
plaisirs futiles de la vie, etc. ? Du coup, ne risquons-nous pas de tomber
dans un autre travers qui serait de vivre comme des pourceaux parce que rien ne nous ferait sortir notre groin de notre bauge ? (1)
Certes, mais on peut aussi croire qu’il y a d’autres sources
de valeurs qui correspondraient à une transcendance « horizontale »
(Luc ferry) qu’on aurait à chercher dans l’histoire de l’humanité ou dans un
idéal de loyauté envers autrui. Mais même si cette croyance n’avait aucun poids
en face des perversions de la consommation et l’avidité du profit, au moins ça
ne conduirait pas à massacrer les voisins à coup de kalachnikov… Après tout, le
commerce international pourrait bien garantir la paix mieux que n’importe quel
traité. C’est en tout cas ce que pensait Kant.
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(1) C’est ce qu’affirmait le Discours du Latran du Président Sarkozy, en violation de la laïcité
qu’il était censé représenter ; mais ça c’était du temps où il était
chanoine de Latran (voir ici)
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