La différence entre un homme courageux et un lâche est très
simple. C’est une question d’amour. Un lâche s’aime…
Philipp
Meyer – Le fils (ch. 13)
Sur le modèle de la définition aristotélicienne (Le genre +
la différence spécifique), voici la définition de la lâcheté : « Réaction au
danger + Amour de soi ».
N'est-ce pas également par ce narcissisme que s'explique la
peur de mourir ? On pense irrésistiblement à Néron, qui, au moment de se
trancher la gorge, pleure la perte que sa disparition va infliger au Monde : «
Qualis artifex pereo ! » (Quel grand artiste périt avec moi !).
Avant de dire que c’est une prétention ridicule,
demandons-nous si, à quelques différences près, ce n’est pas ce qui nous pousse
à garder la vie le plus possible.
Il est difficile de s’introspecter sur ce plan – car
savons-nous pourquoi on a peur de mourir ? Ne serait-ce pas simplement pour
continuer à jouir des plaisirs de la vie ? Pour conserver l’amour de nos chers
amis, et celui de nos enfants qui grandissent sous notre regard ému ?
- Regardons ailleurs pour faire le point. Par exemple, la
spiritualité orientale, qui nous enseigne à aimer la mort comme libération
spirituelle ; raison pour la quelle le corps du défunt, si précieusement
conservé chez nous, est brûlé rituellement dans toutes ces religions.
Du coup, ce que refusent ces religions exotiques c’est
précisément ce que nous recherchons essentiellement : la survie post-mortem de
notre moi jusqu’à la résurrection de son corps. Notre consolation lors de la
mort d’un être cher n’est elle pas de penser qu’un jour nous aussi nous
pourrons mourir et alors aller la retrouver ? (1)
Voilà donc : nous voulons conserver la vie pour jouir plus
longtemps de nous-mêmes. Ce qui atténue le malheur de mourir, c’est l’idée que
notre précieux Moi va continuer d’exister – ailleurs, mais inchangé.
Si la lâcheté explique la peur de mourir, alors c’est bien
le narcissisme qui à son tour explique la lâcheté.
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(1) La femme du Roi
Renaud le chante : « Renaud, Renaud, mon réconfort / Te voici donc au rang des
morts ! / Terre fend-toi, terre ouvre-toi / Que j’aille rejoindre Renaud mon
Roi ! ».
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