L'intelligence
c’est ce qui permet à un individu de communiquer avec tous les autres. Elle
implique non seulement la compréhension mais également la bonté. Partant de là,
j’affirme, je clame, qu’il n’existe pas de salauds intelligents.
San-Antonio
Bonté. Subst fém. – Qualité d'une personne bonne,
portée à considérer, traiter les autres d'une façon favorable, en s'abstenant
de leur nuire, et surtout en œuvrant pour leur épanouissement vital, aux dépens
même de ses propres intérêts.
T.L.F.
Le con est un être bizarre : on
en voit partout et pourtant on ne sait comment les reconnaître autrement que
par une intuition péremptoire.
L’avantage du salaud, c’est
qu’on sait qui il est, et comment le reconnaître, car on en a une définition
claire et précise.
- Mettons cette observation
à l’épreuve de la définition de San Antonio.
« Il n’y a pas de salauds intelligents » :
on le voit, la philosophie San-antoniesque va au-delà de la philosophie
sartrienne. Pour Sartre, en effet, le salaud peut fort bien être intelligent ;
il est seulement celui qui sacrifie la liberté des autres à la sienne. Comme le
dit Comte Sponville « Le salaud,
c’est celui qui est prêt à sacrifier autrui à soi, à son propre intérêt, à ses
propres désirs, à ses opinions ou à ses rêves » (1). Bref, le salaud
est un homme pour qui les autres ne sont que des instruments au service de son
intérêt personnel, et on doit considérer les pervers narcissiques comme une
catégorique de salaud.
Reste un
doute pourtant : le pervers est un individu habile à manipuler son entourage
pour faire naitre des sentiments de culpabilité sans jamais se dévoiler. Il lui
faut donc un minimum d’intelligence, alors que (on vient d’en faire la remarque),
selon San-Antonio « il n’existe pas de salauds intelligents ».
C’est que
notre bon commissaire a identifié l’intelligence à l'aptitude à comprendre
les autres. Ainsi l’intelligence se voit-elle impliquée dans la bonté. Je
comprends les autres donc je suis doué de bonté, suivant la définition citée du
TLF.
o-o-o
Toutefois, si
on ne conteste pas cette définition de la bonté, en revanche lier
l’intelligence à la possession de cette qualité morale laisse songeur. Il faut
une bonne dose d’optimisme et de philanthropie pour en arriver là, et certains – dont je fais partie – douteront
de la validité de ce jugement.
Le risque
avec l’intelligence, c’est son aptitude à construire de vastes systèmes
composés de nombreux rouages dont on gère le fonctionnement globalement : du
coup chacun de ces rouages perd son intérêt pour ne conserver que son rôle dans
la vaste machine qu’on a imaginée. L’intelligence « gère » les individus
qui ne doivent qu’obéir ; mais l’ultime raffinement intervient quant ces
êtes soumis sont amenés à aimer leur soumission.
Ainsi du
stoïcisme selon lequel l’homme doit aimer la nature à la quelle il est soumis –
même si elle le broie, car le tout vaut mieux que la partie.
Dans les
procès de Moscou les accusés avaient l’« intelligence » de demander
au juge de les condamner pour leur turpitude contre-révolutionnaire.
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(1) Voir son
développement ici.
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