Thursday, May 28, 2009

Citation du 29 mai 2009

La compassion n'engage à rien, d'où sa fréquence. Nul n'est jamais mort ici-bas de la souffrance d'autrui. Quant à celui qui a prétendu mourir pour nous, il n'est pas mort : il a été mis à mort.

Cioran – Sur les cimes du désespoir

La compassion n’engage à rien, et c’est d’ailleurs une raison pour se méfier de l’importance qu’on lui donne aujourd’hui en politique (cf Post du 2 mars 2008).

Notre propos du jour sera un peu différent. Cioran fait mine de nous alerter sur une trop grande crédulité : ne comptez pas trop sur la compassion pour vous tirer d’affaire – même Jésus n’y a rien pu. Laissons le blasphème et allons à ce qui nous semble essentiel. Car la compassion est une passion ou si l’on préfère un sentiment, et on devrait se demander si un sentiment a jamais changé quelque chose dans l’ordre du monde.

Alors, c’est vrai Hegel nous avertissait que « rien de grand ne s’est accompli dans le monde sans la passion » (cf. Ici). Mais la passion – et même la compassion – ne fait rien par elle-même ; elle a besoin de la raison pour la guider (le même Hegel disait aussi que si la passion est la voile, la raison est le gouvernail).

Bref, pour agir il nous faut quelque chose de plus que le sentiment qui nous pousse en avant. Il nous faut un peu d’organisation, un peu de rationalité dans l’action ; mais il nous faut aussi une représentation de l’avenir – par exemple celui que nous devons souhaiter à ceux que nous aimons. L’amour des autres est un bon début ; mais il faut savoir aussi ce que cet amour nous conseille comme avenir pour eux. Que devons-nous vouloir de bon pour eux ? Rappelons que même par rapport aux enfants, il n’est pas sûr que l’amour d’une mère soit le meilleur conseiller. Rousseau a confié ses propres enfants à l’Assistance Publique (1), et il a décrit dans Emile l’éducation modèle d’une garçon, confié dès l’age de 3 ans à un précepteur, un père n’ayant selon lui pas compétence pour le faire.


(1) J’ai lu quelque part que notre Philosophe souffrant d’une affection aigue de la prostate hésitait à croire que ces enfants étaient les siens ! Quoi ? Thérèse l’aurait trompé ? Shocking !

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