Personne ne se repose jamais vraiment, on imagine qu'on se repose ou qu'on va se reposer mais c'est juste une petite espérance qu'on a, on sait bien que ça n'existe pas, ce n'est qu'une chose qu'on dit quand on est fatigué.
Jean Echenoz Je m'en vais
Notre nature est dans le mouvement, le repos entier est la mort
Pascal Pensée 544
Requiem æternam dona eis, Domine,
Missa pro defunctis (Liturgie catholique) (1)
Se reposer : voilà donc la finalité des vacances ? Est-ce si sûr ?...
Nous sommes toujours pris dans l’ambiguïté du mot : le repos comme arrêt du mouvement est sans cesse confondu avec le repos comme arrêt du travail (ou d’une activité fatigante comme le dit le TLF). Le repos total est impossible, parce qu’il n’est pas le simple arrêt du travail, mais qu’il suppose aussi l’immobilité de l’âme. Le repos de l’âme serait en réalité la cessation de toute pensée (au sens d’état de conscience) et comme le dit Descartes, l’âme pense toujours.
Mais alors que chez Pascal l’impossibilité de rester en repos est la preuve de la misère humaine – liée au péché et à la nature corrompue de l’homme – ici, c’est au contraire une simple observation : ne cherchons pas le repos, parce que nous ne pourrions le trouver que dans la mort. Requiescat in pace.
Ça ne fait pas envie… N’y aurait-il pas une autre solution ?
- La paix de l’âme, son équilibre qui seul peut conférer à l’âme humaine une véritable immobilité est bien sûr une forme de repos – seulement voilà : elle n’est accessible qu’aux plus grands sages, et c’est même à leur sérénité qu’on les reconnait.
- Reste que ce n’est peut-être que par une opinion fausse qu’on oppose le repos au travail : Kant considérait que le repos de l’âme est plus proche de nous quand nous travaillons, quand une activité aussi prenante nous empêche de penser à nous : L’homme doit être occupé de telle manière qu’il soit rempli par le but qu’il a devant les yeux, si bien qu’il ne se sente plus lui-même et que le meilleur repos soit pour lui celui qui suit le travail. (Cité le 29 février 2008).
C’est pourquoi Kant considérait qu’il fallait le travail pour trouver un repos qui soit accessible à tous – un peu comme ces insomniaques qui ne peuvent trouver le sommeil que dans l’épuisement physique qui lamine leurs facultés intellectuelles et affectives.
Sinon, qu’est-ce qui ferait courir les marathoniens ?
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(1) Paroles latines :
Requiem aeternam dona eis, Domine ; / et lux perpetua luceat, luceat eis. / Te decet hymnus, Deus, hymnus Deus, in Sion, / et tibi reddetur votum in Jerusalem.
Exaudi orationem meam ; / ad te omnis caro veniet.
Requiem aeternam...
(Traduction) :
Le repos éternel, donne-leur Seigneur, et que la lumière éternelle brille sur eux. À Toi est due la louange, ô Dieu de Sion, et on accomplit les vœux qu'on te fait dans Jérusalem
Exauce ma prière, Que tout être de chair vienne à Toi
Le repos éternel...
(2) Toutefois, le repos qui suit le travail est en réalité le sommeil, image de la mort insinuée dans la vie.
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