L'atome n'est que le dernier refuge où l'être, rendu à ses éléments premiers, poursuivra une sorte d'immortalité sourde et aveugle.
Albert Camus
Rien ne vient du néant, et rien, après avoir été détruit, n'y retourne. Les atomes se déplacent dans tout l'univers en effectuant des tourbillons et c'est de la sorte que se forment les composés : feu, eau, air et terre.
Démocrite
Il nous arrive de nous extasier sur telle ou telle pensée d’un auteur contemporain, et puis en suite de nous dire : Bah ! Après tout il n’a fait que paraphraser un auteur de l’antiquité.
Moi qui ai tenté d’enseigner la philosophie et de noter des copies d’élèves, je vous dirai ceci : qu’une paraphrase intelligente (= qui ne trahit pas un texte tout en le maintenant intelligible), ce n’est pas si mal.
Ainsi de Camus, qui reprend à son compte la pensée de Démocrite concernant l’atome, qui matérialise le plus petit niveau de l’être, si petit qu’il en devient indestructible (1). L’atome est le dernier refuge de l’être, parce qu’il ne peut retourner au néant. Avec en prime la thèse qu’il n’y a pas de passage entre l’être et le néant (cf. la thèse de Parménide dans le Sophiste de Platon).
On objectera qu’après Hiroshima on sait bien qu’on peut diviser l’atome, et même que ça répand le néant un peu partout. Mais en réalité, on imagine que si l’atome se divise, il en résulte un tas de petits atomes, qu’on appellera « particules » et rien n’aura véritablement changé.
Bachelard a ironisé sur l’ignorance des philosophes qui se prétendent hardiment « matérialistes » comme s’ils savaient ce que c’est que la matière. Et de fait, la philosophie a échoué à la penser autrement que comme une « chose » qui, si petite soit-elle, pourrait être posée sur une table ou bien être rangée dans une boite. A cela, les physiciens répondent : l’onde, la tension, l’énergie doivent remplacer la matière-objet et après ça débrouillez-vous pour philosopher sur l’existence !
Mais on le voit avec cette pensée de Camus : ce n’est pas la matière qu’il est impossible de penser ; c’est le néant. (Voir notre Post du 28 janvier 2008)
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(1) a-tome : qu’on ne peut diviser.
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