Tuesday, August 28, 2007

Citation du 27 août 2007

Vertige 1- Vertige du philosophe
Le plus grand philosophe du monde sur une planche plus large qu’il ne faut, s’il y a au-dessous un précipice, quoique sa raison le convainque de sa sûreté, son imagination prévaudra. Plusieurs n’en sauraient soutenir la pensée sans pâlir et suer
Pascal - Pensées frg 41 (1)
Vertige de l’amour… Non, ça c’est pour après-demain (Vertige 3). Aujourd’hui, le vertige n’est rien qu’un exemple, le plus probant peut-être, de la puissance de l’imagination. Cette « maîtresse d’erreur et de fausseté » (2) est ici confrontée à l’orgueilleuse raison, dont Pascal veut rabattre la superbe : le vertige du philosophe est le signe de l’échec de la rationalité qui ne peut rien contre la représentation des choses.
A ceux qui ont le vertige : comment faites-vous pour lutter contre ça ? Ceux qui ne l’éprouvent pas tentent de vous rassurer : ils sautent à pied joint sur la planche de Pascal pour vous montrer qu’elle est solide, ou bien ils vous montrent qu’il y a la place de deux pieds côte à côte là où vous craignez d’en mettre un seul… Peine perdue : ce sont des arguments rationnels, là où l’imagination prévaudra.
Alors bien sûr, Pascal se moque éperdument que vous ayez le vertige, il ne se pose pas la question de savoir comment lutter contre. Nous on a essayé : on a trouvé la thérapie comportementale. Je ne résiste pas au plaisir de vous citer l’essentiel de ce qu’on enseigne aux élèves infirmières à ce sujet : « La thérapie comportementale estime que le symptôme est la maladie. Il faut donc travailler à substituer d’autres symptômes plus opérants que ceux-ci, ou moins handicapants ». (3)
C’est donc l’imagination qui va transformer l’imagination. Tout le problème est de trouver un symptôme moins handicapant que le vertige, et qui puisse néanmoins se substituer à lui.
Supposez que vous êtes dans les bras d’un super beau mec, bien baraqué, qui vous porte pour franchir le passage vertigineux. Ça marcherait peut-être?
Mais si c’est Vanessa Paradis qui vous fait fantasmer, alors là, ça ne marchera pas.
(1) Pascal s’inspire de Montaigne. « Qu’on loge un philosophe dans une cage de menus filets clairsemés, qui soit suspendue au haut des tours de Notre-Dame de Paris… et si ne se saurait garder que la vue de cette hauteur extrême ne l’épouvante et ne le transisse. »
Montaigne - Essais II, 12
(2) Voici un extrait du célèbre fragment 78 des Pensées : « Imagination. - C’est cette partie dominante dans l’homme, cette maîtresse d’erreur et de fausseté, et d’autant plus fourbe qu’elle ne l’est pas toujours, car elle serait règle infaillible de vérité si elle l’était infaillible du mensonge. Mais étant le plus souvent fausse, elle ne donne aucune marque de sa qualité, marquant du même caractère le vrai et le faux. Je ne parle pas des fous, je parle des plus sages et c’est parmi eux que l’imagination a le grand droit de persuader les hommes. La raison a beau crier, elle ne peut mettre le prix aux choses. »
(3) Voir ceci
Bon, si vous voulez un peu plus corsé, voyez ça

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