Tuesday, June 14, 2016

Citation du 15 juin 2016

Qui donne aux pauvres prête à Dieu
Victor Hugo (attribué à -)

Quiconque fait la charité sera récompensé par Dieu dans le futur. La récompense – disons plus généralement la rétribution (en bien comme en mal) est du domaine de l’avenir et c’est là sa principale caractéristique. Dieu vous le rendra ; je vous paierai à la saint Michel ; emprunt d’Etat remboursable dans 25 ans.
Oui, de même qu’on ne peut avoir en même temps le beurre et l’argent du beurre, le remboursement d’une dette s’effectue dans un avenir dont il faut comprendre qu’il comporte bien des aléas. Cette remarque est à prendre au sérieux car c’est elle qui justifie l’existence des intérêts versés pour un emprunt.
On entend dire souvent que l’intérêt versé pour un emprunt est un loyer. Je crois que l’essentiel n’est pas là, car on voit bien que son taux varie non seulement selon la durée du prêt mais aussi selon la solvabilité de l’emprunteur. Ce qu’on paye en empruntant c’est le risque que court le préteur de ne pas récupérer son argent, l’idée étant que si d’aventure nous ne remboursons pas, cette perte sera compensée par les bénéfices réalisés grâce aux agios versés.

Mais le philosophe sera sans doute attentif à autre chose encore – quelque chose de plus « métaphysique ». Si l’aléa est lié inexorablement à l’avenir c’est parce que celui-ci est le domaine de ce qui n’est pas encore et de ce qui peut-être ne sera jamais, parce qu’il est une sorte de non-être. « Si Dieu le veut » disait-on autrefois d’un évènement futur. Bref : même si, comme dit saint Augustin, « ce non-être tend vers l’être », il n’en reste pas moins quelque chose qui sera… ou pas. C’est même cela qui justifiait selon l’Eglise certains prêts à gage – tel, par exemple que celui-ci : nous sommes au 13ème siècle, un homme arrive un matin sur une foire de Champagne ; sa bourse est vide et il va emprunter de l’argent. Avec celui-ci il achète du tissus, le débite, le revend avec un certain bénéfice. Le soir, il va rembourser son emprunteur et lui verse un intérêt convenu pour le risque couru par celui-ci de ne jamais revoir son argent.

D’où le caractère inquiétant du crédit à la consommation : car dans ce cas, l’emprunteur n’est plus le vendeur de tissus mais l’acheteur de réfrigérateur. Et du coup, le bénéfice destiné à financer les intérêts n’existe plus. Telle est la situation des grecs aujourd’hui qui doivent emprunter pour rembourser non le capital mais seulement les intérêts. (1)
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(1) Les remboursements plus substantiels doivent commencer en… 2022. Si Dieu le veut !

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