Saturday, January 08, 2011

Citation du 9 janvier 2011

La terre est une colonie pénitentiaire où nous avons à subir une peine pour des crimes commis dans une existence antérieure.

Strindberg

Tiens, encore des colonies ? On remet ça avec la leçon de vocabulaire ?

- Ne nous fâchons pas : il ne s’agit pas de revenir sur les colonies, mais simplement de relever qu’on doit, selon Strindberg, payer dans cette vie pour des crimes commis dans une existence antérieure.

L’idée générale est que notre vie prend son sens en référence à une autre période que la nôtre : si nous payons dans cette vie les méfaits commis dans une vie précédente, ça veut bien dire que notre vie d’aujourd’hui est incompréhensible si nous ne l’examinons pas à la lumière d’une série d’actes commis avant notre naissance, alors que nous en étions à vivre une autre vie (1).

Ce que nous subissons prend donc son sens par rapport au passé, et ce que nous faisons, c’est-à-dire nos actes actuels, ne prend un sens que par rapport à notre vie future.

Si nous récusons la réincarnation, nous pouvons encore croire à la destinée immortelle de l’âme qui, au-delà de la mort va « vivre » indéfiniment les joies ou les peines qu’elle aura méritées par ses vices et ses vertus d’âme vive. C’est l’Enfer ou c’est le Paradis, mais en tout cas, c’est définitif.

Dans tous ces cas, notre vie « terrestre » n’a pas de sens en elle-même, elle doit pour être pleinement comprise – et donc pleinement vécue – être rapportée à autre chose qu’elle.

--> C’est ça que récuse le matérialisme depuis ses débuts : la vie a son sens en elle-même, et si rien n’existe après, rien n’existe non plus avant.

Et qu’on ne dise pas que la croyance en l’immortalité de l’âme est une consolation dont on ne saurait se passer sans désespoir ; Epicure le dit avec constance : personne n’espère mourir, mais tout le monde craint la mort – et si nous craignons de mourir c’est parce que nous craignons le châtiment divin. Ne crains pas, nous dit-il, le châtiment éternel, car ton âme périra avec toi.

Mieux vaut le néant que l’Eternité.

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(1) J’ai déjà évoqué à ce propos le mythe platonicien d’Er le Pamphylien. On pourra le relire.

République, livre 10, 614b-621d

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