Monday, September 11, 2017

Citation du 12 septembre 2017

L'ignorance et la bêtise sont des facteurs considérables de l'Histoire.
Raymond Aron – Le spectateur engagé

Voilà un sujet de méditation qui risque de nous entrainer très loin : car si l'ignorance et la bêtise paraissent parfaitement contingents, en revanche on voudra toujours expliquer de façon rationnelle et par des causes essentielles les évènements historiques. On se dit que, par exemple, Louis XVI qui fut incapable de reprendre le contrôle de la situation en 1789, aurait de toute façon été entraîné par la tornade révolutionnaire, quand bien même il eut été conseillé par Machiavel en personne. Pourtant Aron le suggère, il en aurait été autrement avec un roi un peu plus malin : peut-être aurait-il réussi à se maintenir au pouvoir, le temps de redresser la situation économique et politique ? On dira qu’on parle pour ne rien dire parce qu’on ne réécrit pas l’histoire. Oui, c’est vrai : l’histoire ne peut se réécrire – mais c’est tout bonnement parce qu’elle n’est jamais écrite sauf après-coup, par l’historien qui introduit la nécessité d’un enchainement logique.
Pour tenter de vérifier l’adage de Raymond Aron, tâchons d’analyser un évènement contemporain, qui n’est pas encore dans les manuels d’histoire : le Brexit.
On nous explique que les citoyens britanniques ont été inondés de fausses nouvelles qui ont déformé l’opinion, l’entrainant vers le vote favorable à la sortie de l’Europe – la vérité ne se révélant qu’en suite lorsque ces conseillers maléfiques ont fuit leurs responsabilités au lendemain du vote.  Ces mensonges étaient faciles à démasquer, mais… c’est précisément ce que beaucoup n’ont pas su faire (par ignorance), ou ont refusé de faire (par bêtise).
Mais en fait c’est là que nous retrouvons l’incertitude précédente : est-ce de la bêtise et de l’ignorance, forces indéniables mais accidentelles, ou bien s’agit-il d’illusions issues de désirs puissants et profonds qui accompagnent la nature humaine en toute époque et en tout lieu ?
A moins que cette analyse ne soit elle-même qu’un peu d’illusion projetée sur le puissant cours de l’histoire, fleuve profond et souterrain qui en charriant les choses humaines nous donne à croire qu’elles ont décidé elle-même de se déplacer, alors qu’elles ne sont qu’entrainées ?

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