Tuesday, November 18, 2008

Citation du 19 novembre 2008


Monsieur mon père, si vous eussiez eu cette volonté, vous n'eussiez pas quitté le lieu où il fallait le faire.

Elizabeth de Vendôme, dite Mlle de Vendôme (7 août 1620, au château d'Angers)

Le duc de Vendôme, demi-frère de Louis XIII bataille contre lui pour rétablir l’influence de leur mère Marie de Médicis, écartée du pouvoir par le jeune roi.

L’affaire tourne mal et la retraite est décidée.

Arrivé à Angers, le duc de Vendôme avertit la Reine-mère de la mauvaise nouvelle, lui disant alors : "Madame, je voudrais être mort".
Ce à quoi sa fille Elizabeth, âgée de six ans, aurait répondu : "Monsieur mon père, si vous eussiez eu cette volonté, vous n'eussiez pas quitté le lieu où il le fallait faire".

– Comment ? C’est une gamine de six ans, qui non seulement fait la morale à son père en plein drame familial, mais qui en plus le fait à l’imparfait du subjonctif ?

Car voilà où nous en sommes : le subjonctif – et plus particulièrement son imparfait – est la chose la plus étonnante qui soit, au point qu’il n’y a que les orateurs en peine d’auditeurs ou bien désireux de se parer des couleurs de la Culture de la Civilisation Française (Le Pen !!!) pour l’utiliser.

Quand aux autres, ils se contentent de faire rire.

Tel ce poème :

Oui, dès l’instant que je vous vis,

Beauté féroce, vous me plûtes;

De l’amour qu’en vos yeux je pris

Sur-le-champ vous vous aperçûtes.

Ah! Fallait-il que je vous visse,

Fallait-il que vous me plussiez,

Qu’ingénument je vous le disse,

Qu’avec orgueil vous vous tussiez?

Fallait-il que je vous aimasse,

Que vous me désespérassiez,

Et que je vous idolâtrasse

Pour que vous m’assassinassiez?

H. Gauthier-Villars - Déclaration d’un grammairien à sa mie (1) (2)

Notez que Gauthier-Villars a évité l’emploi du verbe savoir à l’imparfait du subjonctif. Pas sûr que nous aurions la même délicatesse aujourd’hui.


(1) Gauthier-Villars est le célèbre Willy qui co-signa les premiers romans de Colette.

Il fallut donc qu’il les cosignât pour que nous le connussions ?

(2) D'autres sources attribuent ce poème à Alphonse Allais (voir ici)

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