Sunday, January 18, 2015

Citation du 19 janvier 2015

Le blasphème n'est scandaleux qu'aux yeux de celui qui vénère la réalité blasphémée.
Pierre Bayle / 1647-1706
Blasphème… Religion… Laïcité… (suite)
Quelles sont les conditions de possibilités du blasphème ?
Suffit-il de proférer une parole outrageante, quelle qu’elle soit et surtout quelque soit celui qui la profère ? Si un perroquet proférait une telle parole (et on peut fort bien le dresser à le faire) serait-il blasphémateur ? Celui qui profère un juron blasphématoire en se donnant un coup de marteau sur le doigt est-il coupable ?
Au contraire doit-on estimer que l’intention d’offenser Dieu et de souiller le sacré est déterminante ?
Plus encore : le blasphème est-il constitué dès lors que celui qui le prononce n’est pas un fidèle de la religion agressée. Les caricatures de Mahomet dès lors que ceux qui les ont produites étaient des infidèles devaient-elles inquiéter la communauté musulmane, puisque ce n’était pas un musulman qui les avait produites ?
On le voit, selon Bayle ce dernier point est acquis : l’infidèle – ou l’athée – n’est pas coupable s’il offense la divinité d’une autre religion, tout simplement parce qu’il ne reconnait pas son existence. On peut si on est fanatique lui reprocher de ne pas croire en Dieu, celui de la Vraie Religion. Mais on ne peut lui reprocher de blasphémer, étant donné qu’il ne peut chercher à nuire à une entité qui pour lui n’a pas d’existence. Faudrait-il donc imaginer les dessinateurs de Charlie Hebdo persuadés que Mahomet existe bel et bien et qu’il est fâché de se voir caricaturé ?

Risible. Sauf que les Intégristes de tout poil ne l’entendent pas de cette oreille-là. Pour eux le Blasphème est constitué dès lors que l’acte (oral, ou bien écrit, mais pas seulement : reportez-vous à l’histoire de Chevalier de la Barre contée hier) est perpétré. Même dans le cas du Perroquet, même dans le cas de la machine à reproduire les paroles, le seul fait que ce soit proféré suffit : il y a derrière ça une conception magique du verbe, qui agit du simple fait qu’il soit énoncé.

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