Friday, August 12, 2011

Citation du 13 aout 2011

La peur est ce qui gronde dans le courage ; la peur est ce qui pousse le courage au-delà du but.

Alain – Les idées et les âges

Il suffit de faire un petit tour dans une encyclopédie des citations pour se rendre compte que les rapports entre le courage et la peur y sont très fréquemment évoqués, mais à chaque fois avec une signification différente : tantôt c’est le courage qui résiste à la peur, tantôt c’est la peur qui vient freiner le courage, tantôt, comme ici, elle l'amplifie. Comment s’y retrouver ?

J’ai l’idée que ce ne serait qu’à condition de considérer la peur comme une donnée fondamentale de l’être humain, quelque chose qu’on ne pourrait éradiquer même si on la repousse par nos vertus les plus fortes – et donc qu’il faut comprendre (dans un premier temps) sans prendre en compte ses rapports avec le courage.

Ainsi Hobbes qui nous explique que les humains sont et seront toujours en guerre les uns contre les autres, parce qu’ils auront toujours peur.

Déjà, nous sommes selon Hobbes en conflit avec nos semblables parce que nous ne leurs faisons pas confiance, parce que nous croyons fermement qu’ils profiteront d’un moment d’inattention de notre part pour nous voler, nous piller, nous assassiner. C’est pourquoi, dit-il, nous fermons nos coffres parce que nous craignons nos proches, nos portes parce que nous craignons nos voisins, et nos frontières parce que nous craignons le reste de l’humanité. L’homme est un loup pour l’homme, c’est bien connu.

Mais il y a plus. Aucun traité de paix, aucune alliance ne saurait pacifier l’humanité, parce qu’une seconde peur nous tenaille en permanence : la peur de manquer. Oui, quand nos coffres et nos greniers regorgent d’or et de grains, quand nos besoins sont comblés et que l’avenir semble assuré, nous restons encore inquiets de l’avenir : nous n’avons jamais assez pour nous tranquilliser. Il nous faut donc prendre à nos voisins ce que nous n’avons pas encore, et trembler qu’ils ne le fassent à notre encontre : la peur des autres est réactivée par la peur de manquer.

Concluons : Alain nous dit que, dans l’affrontement, le courage est une donnée raisonnable et donc mesurée, la peur est une passion qui déclenche le même comportement que le courage, mais qui en revanche exclut toute limite – seul le pacifisme pourrait nous protéger.

Hobbes explique alors que l’affrontement est perpétuel et que, là aussi, la peur joue un rôle essentiel.

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