Monday, September 16, 2013

Citation du 17 septembre 2013


Il est plus facile de légaliser certaines choses que de les légitimer.
Chamfort – Maximes et pensées
C’est de temps en temps la pensée qui nous vient à l’esprit, quand on parle de légaliser l’usage du cannabis.
Et en effet beaucoup considèrent que légaliser la vente de cette drogue est une facilité dangereuse parce qu’elle revient à « baisser les bras » devant la difficulté de lutter contre sa consommation qu’ils considèrent comme un danger potentiel : on ne devrait donc jamais en légaliser la vente. Leur principe est simple : ce qui est illégitime ne doit jamais être légal.
On objecte : la loi répressive est sans effet sur la consommation et en plus elle entraine des trafics qui prospèrent uniquement parce qu’ils sont lucratifs. De ce fait, les trafiquants eux-mêmes devraient vouloir que la loi répressive continue d’exister car c’est là l’origine de leurs bénéfices.
Toutefois, si l’on acceptait de discuter le principe qui exclut toute légalisation de ce qui est illégitime, alors on se poserait cette question : qu’est-ce qui est le plus pernicieux : interdire la consommation et le commerce de cette drogue, ou bien en nourrir le trafic par des lois répressives ?
--> C’est ici qu’on pourrait reprendre l’idée de Chamfort : à l’inverse du principe évoqué ci-dessus, disons qu’on peut légaliser sans légitimer. Rien ne légitime la consommation de drogue, mais la loi peut en légaliser le commerce : ce n’est pas parce qu’il n’est pas légitime de boire de l’alcool ou de fumer du tabac (en raison de leurs méfaits) qu’on doit interdire d’en consommer. La prohibition de l’alcool aux USA de 1919 à 1933 (1) en a montré amplement les inconvénients.
Au fond si on a du mal à penser la solution, du moins peut-on penser le problème : il ne se trouve pas seulement dans le cadre juridique mais aussi dans celui de l’éthique, plus exactement dans l’opposition wébérienne entre l’éthique de la conviction et l’éthique de la responsabilité (2).
On peut regretter qu’il y ait parfois contradiction entre les principes de l’action et l’action elle-même. Mais on sait depuis longtemps qu’il en va ainsi.
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(1) Dans les Etats « secs » cf. ici
(2) « Weber distingue deux éthiques de l’action politique, l’éthique de conviction et l’éthique de responsabilité : ceux qui agissent selon une éthique de conviction sont certains d’eux-mêmes et agissent doctrinalement (…) alors que l’éthique de responsabilité repose sur l’acceptation de répondre des conséquences de ses actes…» (Art. Wikipédia: voir ici – et le texte de Max Weber ici)

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