Saturday, May 13, 2017

Citation du 14 mai 2017

Toute la vie des sociétés dans lesquelles règnent les conditions modernes de production s'annonce comme une immense accumulation de spectacles. Tout ce qui était directement vécu s'est éloigné dans une représentation.
Debord – La société du spectacle, 1 §1

Rappelons que Guy Debord ne s’est pas comme on le croit parfois livré à une critique de la société qui nous présenterait un monde superficiel où le star système et les paillettes du Festival de Cannes constitueraient les valeurs suprêmes.
« Le concept de spectacle se réfère à un mode de reproduction de la société fondé sur la reproduction des marchandises, toujours plus nombreuses et toujours plus semblables dans leur variété » peut-on lire dans l’article de Wikipédia : autrement dit, la société du spectacle est corrélative de la société de consommation, elle en est même le stade qui lui est le plus intimement lié. Pour qu’on puisse passer sa vie à consommer, il faut que tout soit transformé en marchandise, en bien reproductible et vendable. Du coup on plonge dans le monde de l’apparence, de l’illusion – donc du « spectacle » –  et de l’aliénation.
Alors voilà le maitre mot : il ne s’agit pas de critiquer le profit et l’exploitation de la vanité humaine. Il s’agit de dénoncer l’altération de la réalité dans la mesure où celle-ci doit devenir quelque chose qui peut se vendre et d’abord se reproduire selon les besoins du marché (exemple : la pureté devient vendable si on arrive à faire croire qu’elle s’est transformée en eau qu’on peut « produire » et enfermer dans une bouteille).
On comprend que l’aliénation du « spectacle » ne concerne pas les besoins fondamentaux de l’espèce : le malheureux soudanais qui meurt de faim et qui voit ses enfants périr de malnutrition n’est pas concerné par la marchandisation, pas plus que le migrant qui grelotte de froid à nos portes

Debord nous parle de l'aliénation qui est devenue inéluctable, parce qu'elle l'était dès le départ, ce qui nous fait comprendre que l’avenir radieux n’est pas pour demain. Je veux dire : supposez qu’Adam et Eve soient bien sagement restés dans le Jardin d’Eden : n’auraient-ils pas fini par se disputer et s’envoyer des noix de coco à la tête? Le Seigneur-Dieu n’aurait-il pas été obligé de créer Jacques Séguéla et sa force tranquille pour ramener la paix entre eux ?

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