Wednesday, June 14, 2017

Citation du 15 juin 2017

La conquête du superflu donne une excitation spirituelle plus grande que la conquête du nécessaire. – L'homme est une création du désir, non pas une création du besoin.
Bachelard – La Psychanalyse du feu

On a dit bien souvent que le luxe était un penchant pervers des civilisations en décadence, et qu’il avait accompagné l’empire romain tout au long de son écroulement. On ajoute aussi aujourd’hui que le superflu est incompatible avec les capacités de la planète à nourrir quelques milliards d’hommes : il faudra un jour accepter ce principe  « Pour jouir longtemps il faut renoncer à notre aspiration au superflu ».

Le philosophe aime soumettre de tels principes à contradiction. Ici, Bachelard nous en propose une : la recherche du superflu, objet du désir et non du besoin, a soutenu le progrès de l’humanité. Certes, si l’espèce humaine avait su se contenter de l’indispensable, boire l’eau du torrent, pécher la truite juste pour sa faim et dormir dans l’anfractuosité d’un rocher, alors l’ours serait toujours niché au creux des cavernes, et les abeilles industrieuses ne périraient pas empoisonnées par les pesticides.
Oui, mais : si au lieu de causer notre perte le goût du luxe était consubstantiel à notre nature et nous avait propulsé en avant, vers des nouvelles façons de jouir de la vie ? Rêverie de philosophe ? Peut-être pas. Je lis en effet que lors du métissage inter-espèces (1), le sapiens a gagné des facultés venues des espèces concurrentes, et qu’ainsi « en Papouasie-Nouvelle-Guinée un gène hominidé de Denisova permet aux Papous de détecter des parfums très subtils » (Art Wiki.) J’imagine ce métis moitié denisovien moitié sapiens inaugurant ce gène en partant à la découverte du monde pour satisfaire son désir de parfum…
Pour comprendre l’issue de cette quête odorante, lisez donc Le traité des sensations de Condillac. (À télécharger ici)
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(1) La découverte faite récemment d’un crâne de sapiens vieux de 300000 ans au Maroc semble confirmer cette hypothèse : oui, le sapiens a été contemporain de l’homme de Neandertal et de celui de Denisova. Mais ces espèces avant de s’éteindre ont coexisté assez longtemps avec notre espèce pour lui léguer par métissages quelques gènes.

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