Sunday, June 14, 2009

Citation du 15 juin 2009

Je ne crois pas qu'une grande chose puisse être faite sans une certaine forme d'intuition. On ne construit pas une maison en entassant des pierres au hasard. De même on ne construit pas une théorie scientifique par une succession d'opérations logiques élémentaires choisies au hasard. Il faut bien qu'il y ait une idée directrice, un plan initial.

Paul Lévy - Quelques aspects de la pensée d'un mathématicien

Parler du rôle de l’intuition dans la découverte scientifique…voilà un sujet bien austère mais qui doit vous rappeler quelque chose…

Réfléchissez bien ?

Et ça ? Ça ne vous dit rien ?

Mais, oui, bien sûr : le pommier ! Newton !

Si Newton n’avait pas eu un pommier sous les yeux – à ce qu’on dit, au bout de son jardin – il n’eut pas su trouver la théorie de la gravitation (1)

Bon, soyons un peu sérieux.

Et être sérieux en l’occurrence, c’est prendre au sérieux cette anecdote comme étant un peu plus qu’une anecdote.

Supposons qu’en effet la chute d’une pomme soit une observation suffisante pour déclencher le processus de réflexion décrit fort plaisamment ici.

Faut-il pour autant considérer que notre auteur (Paul Lévy) ait raison en disant que cette intuition est utile – voire même nécessaire – pour comprendre la théorie achevée ? Ça se saurait.

Et s’il s’agit de dire que Newton avait déjà à l’état d’éléments disparates ce qui va constituer sa théorie de la gravitation, et que leur mise en ordre vient d’une observation de la nature, alors il faudra m’expliquer pourquoi en recevant la pomme sur la tête il se demande pourquoi ce n’est pas la lune qui lui est tombée dessus…

On se rappelle peut-être que définissant le génie, Kant disait que l’artiste seul avait du génie parce qu’on était incapable de reproduire son œuvre, quand bien même on aurait tous les éléments qui lui ont servi. Et qu’en revanche, le scientifique, fut-il aussi important que Newton ne pourrait être un génie parce qu’on est capable de refaire le cheminement de sa théorie dès lors qu’il l’a publiée.

En réalité, il faudrait diviser le jugement de Kant : certes la théorie de la gravitation achevée peut être comprise et recalculée par quiconque s’y applique. Mais par contre le processus de l’invention, celui qui consiste à passer des phénomènes terrestres – la chute de la pomme – à ceux qui opèrent dans l’espace – l’orbe de la lune – relève du génie, puisqu’on peut tant qu’on veut se farcir des coups sur la tête, ce n’est pas pour autant qu’on va inventer quelque chose de nouveau.


(1) Voici le récit dans Wikipedia.

« Voici un témoignage venu bien plus tard, en 1752, de son ami William Stukeley citant une rencontre d'avril 1726 avec Newton: "Après souper, le temps clément nous incita à prendre le thé au jardin, à l'ombre de quelques pommiers. Entre autres sujets de conversation, il me dit qu'il se trouvait dans une situation analogue lorsque lui était venue l'idée de la gravitation. Celle-ci avait été suggérée par la chute d'une pomme un jour que, d'une humeur contemplative, il étais assis dans son jardin." »

Et plus sérieusement ici

Et Gotlieb ? Ici.

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