Thursday, April 11, 2013

Citation du 12 avril 2013



Certes, saint Mathieu a dit : « Malheur à l'homme par qui le scandale arrive » ; mais la phrase précédant ce mot historique n'est pas moins importante : « Car c'est une nécessité qu'il arrive des scandales. »
Paul Morand –  Journal inutile 1968-1972
(7 mai 1969) (1)
Le philosophe n’a pas l’obligation de dire la vérité sur les évènements qui stupéfient ses concitoyens : car – à supposer qu’il  la connaisse – qui donc le croirait ? Par contre il doit s’en servir pour amener à réfléchir à nos certitudes – pour les mettre éventuellement en perspective.
Telle est « l’affaire Cahusac », le scandale politico-financier qui préoccupe les français au point qu’on parle aujourd’hui d’un divorce du peuple d’avec ses élites dirigeantes.
Si ce divorce existe c’est que l’on s’imagine que les hommes politiques doivent avoir un minimum de probité et que leurs fautes dans ce domaine peuvent – et donc doivent – être éradiquées. Mais on compte pour cela sur leur bonne volonté et sur la garantie que représente leur passé irréprochable. Donnons un bon coup de balai nous dit-on, pour chasser ces misérables indignes de leur fonction, et mettons à leur place des gens enfin dignes de notre confiance ! Trouvons des saints laïques afin de les élire !
Or Paul Morand nous rappelle opportunément la parole de Jésus : la faute est impardonnable, mais elle est aussi inévitable. Ce que signe ce jugement, c’est l’échec de la morale qui reposerait sur le sentiment du devoir : aucune morale n’a jamais empêché le mal de régner sur terre. Ne comptez donc pas sur le sentiment du devoir pour empêcher le scandale de la faute. --> Ne comptez que sur la loi et sur les sanctions qu’elle inflige.
Car, ce que je ne peux m’empêcher de faire, il convient que ce soient les autres qui m’en empêchent.
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(1) Évangile chapitre 18 : à lire ici. En attendant, voici le texte exact du passage cité par Morand :
Matthieu 18 /6-7. « [6] Mais, si quelqu'un scandalisait un de ces petits qui croient en moi, il vaudrait mieux pour lui qu'on suspendît à son cou une meule de moulin, et qu'on le jetât au fond de la mer. [7] Malheureux le monde à cause des scandales! Car il est nécessaire qu'il arrive des scandales; mais malheur à l'homme par qui le scandale arrive! »

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