Saturday, November 05, 2016

Citation du 6 novembre 2016

Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’interprétation d’aucun fait est une injure.
Loi sur la liberté de la presse – 29 juillet 1881 (1)

Qu’est-ce donc qu’une injure ? L’énoncé de la loi de 1881 paraît quand même un peu vague : demandons au célèbre capitaine Haddock de nous en préciser l’idée.
- Déjà, on retient de l’énoncé de la loi que l’injure est constituée de termes méprisants et d’invectives dont le TLF rappelle qu’elles sont constituées « d’injures proférées avec emportement ». Alors voilà notre capitaine effectivement très en colère qui hurle les injures dont il abreuve sans doute un ennemi dans ces termes si curieux dont il a le secret.
- Mais qu’est-ce qui constitue le contenu de l’injure ? Qu’est-ce qui fait par exemple, que le mot « bachi-bouzouk » soit une injure ? C’est que la personne interpellée ainsi est identifiée à un mercenaire (sens réel du mot en question) autant dire un soudard. Il s’agit bien de déprécier quelqu’un en le comparant à quelque chose de méprisable, comme lorsqu’on apostrophe un automobiliste en le traitant de « connard » ou de « fils de p…» (2)
- Enfin, n’oublions pas l’essentiel : Tintin cherche à calmer le capitaine en disant : « Inutile, capitaine. Il est trop loin maintenant »  –  comprenons : trop loin pour vous entendre. Ce qui signifie que pour que l’injure soit, il faut qu’elle soit adressée. Qu’elle soit audible ou pas d’ailleurs, c’est toujours à quelqu’un qu'elle s’adresse et c’est d’ailleurs dans ce sens qu’elle correspond à un acte délictueux.
On peut donc laisser de côté les jurons qui ne rentrent pas exactement dans le cadre de l’injure répréhensible (3) et dont la fonction est plutôt d’exprimer une émotion que d’humilier autrui.
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(1) À consulter ici l’analyse de cette loi concernant l’injure et la diffamation en rapport avec Internet.
(2) Ceux d’entre vous qui seraient à cours de vocabulaire pourront tirer parti de ce site qui recèle sans doute plusieurs centaines d’exemples.
(3) Lorsque le québécois s’exclame « tabernacle », cela va bien sûr à l’encontre de l’autorité religieuse, mais c’est surtout un exutoire pour une émotion ou une douleur (cas de bricoleur maladroit que se blesse d’un coup de marteau et qui s’écrie : « « Hostie de calice ! » – voir cet article passionnant sur le sujet)

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