Monday, October 19, 2015

Citation du 20 octobre 2015

Qu’en étron de pourceaux soient frites ces langues ennuyeuses !
François Villon - Ballade des langues ennuyeuses

Commentaire II
On se reportera au Post du 19 octobre pour le texte complet de la Ballade de Villon. Ce qui éveille ma curiosité, c’est que Villon s’en prend – et de quelle façon ! – non à la méchanceté, non à la cruauté, non à la bêtise, mais à l’ennui. Les gens les plus à craindre sont les gens ennuyeux. Comment expliquer que ce travers devienne aussi redoutable ?
- Une hypothèse est que leur venin soit doux ; qu’il s’insinue sans qu’on s’en aperçoive, ou du moins qu’il soit assez bénin pour qu’on ne pense pas à se mobiliser immédiatement contre lui. Qu’avant qu’on en soit arrivé à ces anathèmes terribles proférés par Villon, on ait subi de longs et insipides discours.
- Une autre explication (qui d’ailleurs n’est pas exclusive de la première) est que l’ennui à l’époque de Villon avait une signification beaucoup plus forte qu’aujourd’hui. Là où nous ne trouvons qu’un inconfort, Villon trouve une véritable souffrance qui d’ailleurs peut-être non seulement morale, mais aussi physique (voit l’article du CNTRL ici). Cette souffrance ne résulte pas de coups, de brutalités, mais des mots et des discours.

De toute façon – et c’est cette dernière observation qui retiendra notre attention – les pires maux viennent du langage ; on peut certes nous frapper, nous faire souffrir par des mauvais traitements dans notre corps. Mais on peut surtout nous calomnier (ou calomnier nos amis) et nous faire souffrir beaucoup plus gravement par des propos insidieux. Qu’on se rappelle que Iago a terrassé Othello par ses médisances.

No comments: