Thursday, October 04, 2007

Citation du 5 octobre 2007

« L’homme d’État est aussi un artiste. Pour lui, le peuple est ni plus ni moins ce qu’une pierre est à un sculpteur ».

Joseph Goebbels - Michael (1)

On savait déjà que Hitler avait été peintre (cf. Post du 3 juin 2007) ; le voilà maintenant sculpteur.

Mais surtout, voilà le peuple devenu masse informe que seule la volonté et la force de son chef pourra porter jusqu’à une plus haute existence. Qu’était le bloc de marbre avant que l’artiste n’y sculpte la Vénus de Milo ? Le peuple allemand n’est rien sans son Führer, ce qui d’ailleurs explique l’acharnement de Hitler à sacrifier le peuple de Berlin au moment où l’Armée Rouge envahit la ville.

Comparez maintenant cette conception des rapports entre le peuple et son chef avec celui qui existe en démocratie, du moins telle qu’elle a été pensée par le mouvement des Lumières.

Chez Rousseau, la société humaine peut prendre trois formes :

- Le troupeau, soumis à un maître dont la force seule assure la cohésion (cf. Post du 26 octobre 2006)

- un agrégat informe, sans autorité ni loi, dont on ne sait s’il a jamais pu exister

- Le peuple, issu de cet agrégat, constitué d’hommes associés par une volonté commune d’œuvrer au salut de tous.

On l’a compris : en démocratie, le peuple préexiste à son chef (qui n’est pas son « maître »), alors que pour les régimes totalitaires, c’est exactement l’inverse. C’est que le chef n’existe que par la volonté du peuple qui l’a désigné, et que son pouvoir dépend de ce mandat.

Bon, finissons-en avec ces bonnes paroles : et si le peuple désignait son chef pour que celui-ci soit son maître ? Je veux dire, pour qu’il pense à sa place, pour qu’il veuille à sa place, parce que lui, voyez vous, ça le fatigue de penser et de vouloir.

C’était ça, la thèse d’Etienne de la Boétie, dont on souvent parlé (voir label infra).

(1) Goebbels avait écrit en 1929 un roman Michael, que je n’ai pas lu mais dont on cite cet extrait dans cet article (note 21).

5 comments:

Anonymous said...

Les candidats au baccalauréat qui avaient traité il y a quelques années le sujet "La politique est-elle un art ou un science ?", et avaient compris le mot "art" au sens de "beaux arts" (ce qui donnait des copies assez surréalistes), n'étaient donc pas tant que ça dans l'erreur...

Djabx said...

Rien à voir: le label "infra" n'est pas présent dans la liste.

Ce que je trouve intéressant dans votre propos, c'est que vous répondez à cette question "qui est l'homme d'état (=le chef)?" par une autre question "qui est le peuple?".
Il est vrai qu'un chef sans peuple, c'est un peu ridicule. Mais le rôle d'un chef, n'est il pas de "diriger" comme il l'entend le peuple? Que le peuple choisisse son chef c'est une chose, mais qu'il se substitue à lui c'est autre chose.

Aujourd'hui, on entend beaucoup d'hommes politique qui disent, et répète "on vous écoute, on fait comme vous voulez etc." mais n'est ce pas pour masquer leur manque d'idées?
Je trouve ça d'autant plus surprenant quand ces hommes politiques défendent sois disant des idéologies (ex: les communistes) donc leur programme devrai être normalement simple: l'application de cette idéologie, et au contraire de ça, il jouent la carte médiatique du "on vous demande votre avis".

Peut-être c'est que ce ne sont de pas des "chefs"...

Anonymous said...

Mais le rôle d'un chef, n'est il pas de "diriger" comme il l'entend le peuple?
Non, le rôle d'un "chef", du moins dans un régime démocratique, est d'incarner la "volonté générale" (pour reprendre un terme rousseauiste), c'est-à-dire d'être le représentant des aspirations du peuple, et absolument pas de le "diriger" comme il l'entend (ce serait à la limite le pouvoir du dictateur).

Jean-Pierre Hamel said...

- le label "infra" n'est pas présent dans la liste.
J'ai parlé de façon élliptique : je voulais simplement dire que le label "la Boétie", affiché en-dessous (=infra)conduisait à des post qui reprenaient sa théorie du pouvoir.

- Que le peuple choisisse son chef c'est une chose, mais qu'il se substitue à lui c'est autre chose.
Vous avez là une bonne part de la problématique de la philo politique au 18ème siècle.
Rousseau disait : "nous avons des chefs pour ne pas avoir de maîtres".
J'ai bien peur que ce soit-là un vœu pieux.

- il jouent la carte médiatique du "on vous demande votre avis".
On commence à s'en douter : l'idéologie n'est jamais bien loin. Elle est simplement occultée par la démocratie participative, par la présence sur le terrain des ministres à chaque coup dur frappant une communauté. Mais l'idéologie est simplement "hors-champ" comme on dit au cinéma.

J'entendais un commentateur politique anglais parlant de Tony Blair. Il disait que sa prétention à dépasser les idéologies (= idem chez nous) était facile à réfuter : il suffit, disait-il de regarder qui a gagné, qui n'a rien gagné, qui a perdu pendant les années de blairisme.
Attendez donc 2 ou 3 ans,et reparlons-en

Djabx said...

[Le rôle d'un chef est] d'être le représentant des aspirations du peuple, et absolument pas de le "diriger" comme il l'entend

Je crois que le problème sous-jacent est similaire à celui de la poule et de l'œuf.
Ce que je voulais dire, c'est que pour moi, un "chef" défend ses idées, et le peuple vote pour ces idées ou non. Et non pas un chef qui dit "qu'est-ce que vous voulais que je défende pour vous?". Je ne crois pas que ce soit le but de démocratie: mettre en place des "notables" de la politique pour qu'ils puissent écouter nos attentes et y répondre.

De manière générale, si je vote pour un Homme politique de n'importe quel parti, c'est pour ses idées, ses propositions et non pas pour sa capacité d'écoute à faire du populisme en suivant la majorité changeante.
Notre petit Nicolas national, (quelque soit les tenant et aboutissant de ses idées) a le mérite de suivre ses engagements, ses idées. Même si elles sont issues d'une volonté de plaire à une magorité, il ne semble pas avoir envie de changer d'idées ou de manière de faire durant son mendat. Ainsi ceux qui ont voté pour lui ne peuvent pas être "deçue" de ce qu'il fait.
Si on prend le cas de Ségolène qui durant la campagne a manifestement défendue des idées auxquelle elle ne croyait pas (SMIC à 1k€ etc..) comment aurait-elle pu diriger avec des idées qu'elle ne partage pas?