Friday, September 28, 2012

Citation du 29 septembre 2012



De Démocrite : les gens parcimonieux (= avares) connaissent le sort misérable des abeilles : ils travaillent comme s’ils allaient vivre toujours.
Stobée - Florilège, III, XVI, 17)
Métaphore de l’abeille (suite)
Il appartenait à l’antiquité grecque de déprécier le travail de l’abeille en le comparant au travail d’un être vicieux et  absurde : l’avare.
Qu’est-ce que l’abeille et l’avare ont en commun ? De travailler comme s’ils devaient vivre éternellement. Tous deux amassent par leur travail beaucoup plus qu’ils ne devraient pour satisfaire simplement leurs besoins. 
Et c’est vrai : pourquoi les abeilles font-elles tant de miel ? Je veux dire que si nous pouvons leur en prendre tant – et nous ne sommes pas les seuls : les ours le font depuis la nuit des temps – c’est bien parce qu’elles en ont fabriqué beaucoup plus qu’il n’en fallait pour se nourrir.
C’est un mystère pour moi qui ne suis ni entomologiste ni apiculteur ; et c’est un mystère également pour la pensée grecque pour laquelle les insectes n’agissent que poussés par la nature. Or, comme le disait Aristote : « la nature ne fait rien en vain » : donc pas de travail qui ne soit justifié ; et quelle justification pour le travail sinon les besoins à satisfaire ?
Travailler sans besoin, ou au-delà des besoins, sans y être contraint comme l’esclave, c’est aller contre une loi de la nature, et c’est donc bien une perversion.
On voit que Rousseau se trompait qui considérait que seul l’homme peut être un animal dépravé (1) : l’abeille l’est également et ici la métaphore éclairante s’inverse : c’est l’homme (= l’avare) qui éclaire la nature de l’abeille et non le contraire.
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(1) « L’homme qui médite est un animal dépravé. »  – Discours sur l’origine de l’inégalité

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