Monday, January 22, 2007

Citation du 23 janvier 2007

Le voici [le vaste monde] déjà brisé par l’âge, et la terre épuisée/ Enfante à grand peine de petites créatures,/ Elle qui engendra toute espèce et donna / Les corps gigantesques des fauves en ses gésines.

Lucrèce - De la nature II, vers 1150-1153

Energie renouvelable… Développement durable… Vous y croyez, vous ? En tout cas vous croyez sans doute que cette préoccupation remplace l’insouciance d’hommes nourris à l’idée que la terre est inépuisable, que le minerai pousse comme la racine des plantes dans le sol, que la divine Providence veille sur un monde accordé à nos besoins.

C’est là l’erreur. Lucrèce (1er siècle av. J.C.) conçoit la nature, c’est-à-dire le monde, comme une être vieillissant, emportée comme un être vivant (1) par l’âge vers la stérilité et la mort. Le temps cyclique n’existe pas pour lui, et si la naissance est possible, la renaissance ne l’est pas.

La science moderne ne lui donne pas tort : les célèbres monstres préhistoriques avec leurs T.Rex robustes comme des chars Leclerc, leurs oiseaux grands comme des Airbus et des libellules à l’envergure d’avions de chasse, ont existé ; ils n’existeront plus jamais. Car leur existence était fonction d’une nature dont la fertilité et la profusion était liée à l’émergence des premiers continents. Le milieu naturel est devenu exsangue, notre taille est proportionnée à ses capacités, et les Lilliputiens sont tout juste pour demain. Demain, le Sahara commencera à Fontainebleau.

Qu’est-ce qui revient toujours, toujours identique ? La flèche du temps a gagné l’univers entier : le Big-Bang a sonné le glas de l’éternité.

No future ! Après nous, le déluge ! Voilà des formules qui ne doivent plus nous glacer le sang : ce n’est pas nous qui déglinguons la nature : elle le fait toute seule.

(1) Pour le matérialisme épicurien de Lucrèce, il n’y a pas lieu de faire une différence entre la matière inerte et la matière vivante : les mêmes atomes les composent, les mêmes lois en disposent.

1 comment:

Anonymous said...

C'est aller un peu vite : la baleine bleue reste à ce jour le plus grand animal ayant existé sur terre, et l'éléphant n'est pas si Lilliputien que ça... Laissons lui encore quelques millions d'années, et peut-être rivalisera-t-il avec les diplodocus et autres brontausores...