Napoléon : Monsieur de Laplace, je ne trouve pas dans votre système mention de Dieu.
Laplace : Sire, je n'ai pas eu besoin de cette hypothèse.
D'autres savants ayant déploré que Laplace fasse l'économie d'une hypothèse qui avait justement « le mérite d'expliquer tout », Laplace répondit cette fois-ci à l'Empereur :
Laplace : Cette hypothèse, sire, explique en effet tout, mais ne permet de prédire rien. En tant que savant, je me dois de vous fournir des travaux permettant des prédictions.
Dialogue entre Napoléon et Laplace
Ce dialogue est donné comme une illustration du principe qu’on nomme habituellement « le rasoir d’Occam » et qui s’énonce ainsi : « Les multiples ne doivent pas être utilisés sans nécessité » (« pluralitas non est ponenda sine necessitate »), où ce qui ne doit pas être « multiplié sans raison » sont les hypothèses.
Le terme de rasoir à beaucoup amusé, et on a imaginé Occam en ancêtre des barbiers, tranchant de son coupe chou les concepts inutiles dans tous les traités savants qui lui tombent sous la main. Il faut maintenant rétablir la vérité : le « rasoir » d’Occam n’a jamais existé, la formule Occam's razor employée par les anglo-saxon s'expliquant par l'étymologie radere : rasura, en anglais razure = rature. Les hypothèses inutiles doivent être raturées, biffées, et non tranchées à coup de rasoir. (Cf. Lalande - Vocabulaire technique et critique de la philosophie - article parcimonie.)
Je dirai que pour ma part je préfère cette interprétation à la version courante du rasoir qui est bien trop sanguinaire pour moi.
Et en plus j’imagine avec délice le pouvoir et la souveraineté du scientifique armé de sa seule plume et qui d’un geste auguste biffe le mot « Dieu » dans la liste de ses hypothèses explicatives. Voilà qui a de l’allure !
Reste que si ce pouvoir du scientifique est souverain, il n’empêche qu’il n’est pas sans dangers : même si Napoléon n’a pas tenu rigueur à Laplace de son attitude, d’autres Inquisiteurs dans d’autres circonstances l’ont fait ; et on sait qu’à l’époque de Galilée il n’aurait pas fait bon répondre ainsi.
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