C’est une impériale bougresse, tétonneuse, viandée, avec des narines fendues, des yeux démesurés, des genoux magnifiques, et qui avait en dansant de crânes plis de chair sur son ventre.
Flaubert., Correspondance., 1850 (1)
Proclamons les princip's de l'art! / Que tout l' mond' s'entende! / Les contours des femm's, c'est du lard, / La chair, c'est d'la viande.
Charles Cros - Le Coffret de santal, Chanson des sculpteurs (citation du 18-09-2010)
Faut-il le souligner ? Nous commençons à bien regretter l’obsession contemporaine de la minceur, surtout quand elle est féminine. Non seulement ça n’est pas bon pour la santé, mais en plus il ne nous reste plus, à nous autres hommes, que des anorexiques à étreindre.
Le retour des beaux-jours est en même temps celui des régimes qui dans les magazines féminin promettent la perte rapide de kilos de graisse, la platitude des ventres et la fermeté des poitrines…
Je ne reprendrai pas aujourd’hui le refrain « Les hommes préfèrent les grosses rondes ». Je me contenterai de rappeler que souvent, dans le passé, la description de la femme la montre plus que ronde, avec de la chair aux bourrelets redondants et à la consistance grasse : cette Vénus de Rubens en témoigne facilement
En réalité ce que nous oublions, c’est que l’embonpoint aussi a sa justification. Je passerai sous silence pour ne pas alourdir ce Post les Vénus du néolithique. On en verra quelques une ici, et on se rappellera de leur symbolique.
Mais aujourd’hui, qui donc ose parler des femmes comme le fait Flaubert : une bougresse viandée ? Il y a un tabou sur la chair : comme tous les tabous il s’exerce au niveau symbolique, et donc ce sont les mots qu’il frappe d’interdit.
Pas de plis : des rondeurs
Pas de viande, de la chair.
Pas de bougresse tétonneuse, mais une poitrine épanouie.
Nous avons peur des mots. Voilà.
Mais n’oublions pas Rabelais :
Si le signes vous fâchent, oh combien vous fâcheront les choses signifiées. (Voir citation du 9 mai 2006)
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(1) A lire ici. En cadeau, un petit bout de sa lettre pour ceux qui auraient la flemme d’aller tout lire.
« Sur les portes, des femmes debout, ou se tenant assises sur des nattes. Les négresses avaient des robes bleu ciel, d’autres étaient en jaune, en blanc, en rouge, larges vêtements qui flottent au vent chaud. Des senteurs d’épices avec tout cela ; et sur leurs gorges découvertes de longs colliers de piastres d’or, qui font que, lorsqu’elles se remuent, ça claque comme des charrettes. Elles vont, appellent avec des voix traînantes : "Cawadja, Cawadja" ; leurs dents blanches luisent sous leurs lèvres rouges et noires ; leurs yeux d’étain roulent comme des roues qui tournent. Je me suis promené en ces lieux et repromené, leur donnant à toutes des batchis, me faisant appeler et raccrocher ; elles me prenaient à bras le corps et voulaient m’entraîner dans leurs maisons... Mets du soleil par là-dessus. Eh bien ! j’ai résisté, exprès, par parti pris, afin de garder la mélancolie de ce tableau… »
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