Thursday, January 12, 2012

Citation du 13 janvier 2012

La douleur est toujours question et le plaisir, réponse.
Paul Valéry – Sensibilité (Cahiers)
Douleur II
Sans oublier la thèse sur l’insignifiance de la douleur (hier), acceptons du moins qu'elle soit l’occasion d’un questionnement.
Notons d’abord que Valéry, comme Comte-Sponville, n’accorde à la douleur aucun message : puisqu’elle ne fournit aucune réponse, elle ne nous apprend rien ; peut-être même qu’elle annule ce que l’on croyait savoir – qu’elle est une anti-leçon comme le disait Sponville (1).
Comment alors croire que la douleur soit une question ? Et quelle question ?
En nous aidant de la fin de la citation, qui à la question de la douleur, oppose la réponse du plaisir, nous devinons qu’il s’agit du sens de la vie. Le plaisir est l’épanouissement de la vie, la douleur sa négation, puisqu’on ne peut lui accorder une valeur qu’à condition de postuler un « après » de la vie, accessible grâce à ces souffrances, justement (qu’on repense aux doctrines religieuses sur le rachat de la faute(2)).
Si donc la douleur nous questionne, ce ne peut être que sur le sens de la vie – ou plutôt sur le sens qu’il y a à vivre : à quoi bon vivre si c’est pour souffrir indéfiniment ? Le suicide n’est-il pas la réponse à la question posée par la douleur ?
Dans l’antiquité, les épicuriens ne se suicidaient pas. En revanche les stoïciens en avaient fait une preuve de sagesse.
Quant à nous, remarquons qu’une bonne partie du débat concernant l’euthanasie est suggéré dans ce commentaire de la pensée stoïcienne : [Dans le stoïcisme], la mort volontaire peut se justifier rationnellement et est conforme à la nature dans des situations insupportables de souffrance, de maladie, de vieillesse ou d’asservissement, lorsque la vie a perdu son sens ou lorsqu’on n’est plus en mesure d’accomplir ses devoirs sociaux ou de vivre en honnête homme. (Encyclopédie Agora).
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(1) Se reporter au texte cité hier (pour les paresseux du clic, un petit extrait : « On parle pourtant des leçons de la douleur, et chacun, qui l'a vécue, y reconnaît quelque chose de son expérience. Mais ces leçons sont toutes négatives, ou critiques : la douleur n'apprend rien, qu'en annulant ce qu'on croyait savoir. Sa leçon est une anti-leçon. »)
(2) On pourrait penser aux martyrs qui, dans les tourments et les supplices, trouvent l’occasion de manifester la force de leur foi : « Je ne résiste à ces tourments que parce que Dieu m’en donne la force. Mon martyr témoigne de Son existence. »

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