Friday, March 23, 2007

Citation du 24 mars 2007

Je mettais entre les excès toutes les promesses par lesquelles on retranche quelque chose de sa liberté.

René Descartes - Discours de la méthode (1637) (3ème partie - 1ère maxime)

Ah !... Le ministère de l’identité nationale ! Vivement qu’il existe, parce que je suis certain que Descartes en sera l’emblème le plus brillant : comme on le sait, le français est cartésien, alors on va sans doute mettre au programme des écoles l’étude du Discours de la méthode. C’est sûr….

Hé bien, justement, ceux qui devraient l’étudier, ce Discours, ce sont les candidats à l’élection présidentielle. Parce que leur méthode pour agir sur l’opinion, c’est la promesse. Normal, si vous y pensez un peu : un candidat n’a pas de pouvoir, il ne peut rien faire d’autre que d’annoncer ce qu’il fera si…

Seulement, voilà, Descartes nous dit : attention ! Ne faites pas de promesses. Et non pas parce qu’on ne pourrait pas les tenir. Mais parce que ça limite notre liberté : c’est sûr que si on a promis quelque chose, on est moins libre que si on ne s’est engagé à rien.

Alors, Descartes nous explique : on peut faire et respecter des contrats juridiques, on peut exiger par la loi que certaines de nos promesse soient tenues « pour la sûreté du commerce ». Mais, nous dit-il, « je ne voyais au monde aucune chose qui demeurât toujours en même état » : la promesse a lieu dans un monde, et son exécution dans un autre. La liberté, c’est de pouvoir s’adapter au monde, agir en fonction de ce qu’il est et non de ce qu’il a été.

L’exemple, c’est dans la pièce de Sartre Les mains sales qu’on le trouve. Hugo, le personnage principal, est un militant qui vient d’être libéré après une peine de prison qu’il a purgée pour avoir assassiné le dirigeant du parti ennemi. Ses anciens amis le recueillent et lui expliquent que désormais ils ont fait alliance avec ce parti. Il doit désavouer son engagement politique, ou bien devenir lui-même l’ennemi. C’est ce qu’il fait : « irrécupérable » : tel est le mot de la fin.

Le candidat qui ne promet rien (il parait qu’il y en a un), c’est celui qui conserve toute sa liberté d’action. On ironise sur cette promesse de ne pas promettre, parce qu’on ne comprend pas l’enjeu philosophique : y a-t-il une action politique là où il y a contrainte ?

Moi, j’ai une autre question : peut-on élire une liberté ?

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