Thursday, March 29, 2007

Citation du 30 mars 2007

Le meilleur moyen de consoler un malheureux est de l'assurer qu'une malédiction certaine pèse sur lui. Ce genre de flatterie l'aide à mieux supporter ses épreuves, l'idée de malédiction supposant élection, misère de choix.

Emile CIORAN - Écartèlement

Pourquoi la souffrance ? Pourquoi le mal ? A cette question, la réponse la plus courante est : « nous souffrons parce que on nous veut du mal ; on nous veut du mal parce qu’il y a des méchants ». Là dessus Cioran pousse un cran de plus : si les méchants nous veulent du mal, à nous, ce n’est pas seulement leur nature mauvaise qui en est la cause ; c’est aussi parce que nous sommes intéressants. C’est nous, personnellement qui sommes visés. Prétexte consolateur, ou paranoïa ?

- Paranoïa ? Peut-être. Mais je trouve plus intéressant de voir ici l’une des thèses abordée dans le Livre de Job (1) : c’est parce que Job était à la fois puissant et vertueux qu’il a été l’objet de cette expérience satanique de la tentation de renier Dieu dans le malheur. Il fallait, pour que cette expérience soit significative, aller à l’extrême : extrême malheur de celui qui tombe de haut (plus dure est la chute) ; extrême injustice de l’homme pieux, frappé plus durement que l’impie, du juste traité comme le pire des criminels…

- Prétexte consolateur ? Cioran, dans son pessimisme habituel, nous dépouille de notre consolation : « Nous sommes des farceurs, dit-il, nous savons bien qu’il n’y a que le désespoir qui soit vrai, mais nous faisons comme si il y avait un salut à espérer de quelque part… » Mais là aussi, le Livre de Job contient une réponse à Cioran.

La réponse du Livre de Job, c’est que le monde est opaque : Dieu est caché dans les nuées et sa volonté nous est inconnue. La prétention intenable de Job est justement de prétendre mériter d’être chéri de Dieu en raison de sa vertu. Cioran fait comme si le monde était transparent, comme si rien ne nous échappait. Au fond les pessimistes sont tous comme ça : pour eux le mal est évident. Voyez Schopenhauer : il passe sont temps à nous dire : « Allez voir les champs de bataille, les hôpitaux, les prisons, et revenez me dire si vous croyez en la bonté du monde. » Dieu s’adresse à Job : « Où étais-tu quand je fondais la terre ? Dis-le moi, puisque tu es si savant. » (Job, 38-4).

Conclusion : le malheur est un mystère dont la solution nous échappe nécessairement. Mais, la seule chose dont on soit certain, c’est qu’il n’est pas absurde.

Plus que le reniement de Dieu, c’est l’absurdité qui est impie.


(1) Le livre de Job : à lire ici
Sur le livre de Job, on peut lire ceci
Si on est pressé, on peut lire ça

1 comment:

Anonymous said...

Pour moi, on peut nous faire du mal si nous le voulons. Autrement dit, le mal nous atteind si nous nous laissons faire.
Ca peut être le désir de tenter l'expérience ...