« Parle et je te baptise »
Cardinal de Polignac
Cette injonction du Cardinal de Polignac s’adressait à un orang-outang rencontré dans le jardin du roi. C’est Diderot qui rapporte l’anecdote dans l’Entretien avec d’Alembert. Le langage est le propre de l’homme et si ce singe parle, alors il devient un homme digne d’être baptisé.
Commence-t-on à être un homme en parlant ? Cesse-t-on d’être un singe en accédant au discours ? On se rappelle l’inénarrable scène de la Fiancée de Tarzan : Jane rencontre Tarzan l’homme-singe pour la première fois et que fait-elle ? Elle lui apprend à parler. L’homme-singe est donc sorti grâce à cela de l’animalité pour entrer dans l’humanité, et c’est pourquoi sans doute il était si urgent de le « démutiser ».
Ce que je remarque, c’est qu’aujourd’hui ces croyances nous étonnent : la frontière entre l’homme et l’animal nous paraît plus imperméable qu’au Cardinal de Polignac, et même le langage ne suffirait pas à nous persuader du contraire. Nous ne sommes même pas troublés d’apprendre qu’une guenon a appris le langage de signes (par gestes) ; un singe est un singe et un homme est un homme. On n’en démord pas.
Mais a-t-on réalisé que l’inverse a été cru et cela il n’y a pas si longtemps. Qui donc a affirmé que la frontière qui sépare l’homme de l’animal passe à l’intérieur de l’espèce humaine ? Les nazis. Ce sont eux qui affirmaient qu’il y a des races de sous-hommes, c’est à dire des êtres qu’on ne reconnaît pas comme nos semblables, mais qui pourtant sont bien biologiquement (j’allais dire « zoologiquement ») des hommes. Etant de la même espèce, ils peuvent donc se métisser avec l’homme « véritable » : la haine et la peur des juifs était pour les nazis la conséquence de cette menace de « contamination ».
C’est là pour les nazis une raison suffisante pour justifier l’Holocauste.
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