Ce n'est pas la mort qui nous prend ceux que nous aimons ; elle nous les garde au contraire et les fixe dans leur jeunesse adorable …; c'est la vie qui dissout l'amour.
François Mauriac – Le désert de l'amour
Il est vrai que Mauriac parle ici plus particulièrement de l’amour, mais pour une fois il me semble que le couple amour/mort est moins pertinent que celui de jeunesse/mort :
– Vous voulez rester jeune ? Mourez jeune.
Il y a des paradoxes qui se dissipent en même temps qu’ils nous apparaissent : celui-ci en est un. Reste à comprendre ce qui se passe.
Pour dire les choses d’une façon un peu abrupte, il faudrait affirmer que l’éternité est celle du souvenir, et que rien d’autre de ce qui est humain n’est éternel. Nous serons à jamais – si toute fois nous accédons à cette forme d’éternité – cette image que les autres auront fixée de nous, et qu’ils transmettront aux autres générations. Si cette image est celle d’un jeune être qui n’a pas eu le temps de vieillir, alors c’est elle qui sera « à tout jamais » notre image.
Deux observations :
1 – D’abord on a un peu ici l’idée du péché mortel, celui qui scelle notre destin post-mortem dès lors que nous mourons juste après l’avoir commis et avant de nous en être repentis. Nous resterons pour l’éternité définis cette faute qui nous a damné.
2 – Ensuite, on comprend vite que le souvenir que nous laisserons derrière nous n’a guère de chance de survivre à nos enfants, au mieux à nos petits enfants. Vous avez le souvenir de votre arrière grand-mère, vous ?
Conséquence : si vous voulez être immortel, laissez des œuvres qui vous incarnent : Homère avec l’Iliade, Michel Ange avec la Sixtine, etc…
Oui, mais alors, la jeunesse ? Ce n’est pas mon œuvre que je veux immortelle, c’est MOI, moi JEUNE !
C’est très simple : créez une œuvre géniale très jeune et puis disparaissez à 20 ans, comme Evariste Gallois.
Vous avez passé l’âge ? Pas grave : attendez votre prochaine réincarnation.
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