Dans toute morale ascétique, l'homme adore une part de soi-même sous les espèces de Dieu, et il a besoin pour cela de changer en diable la part qui reste...
Nietzsche - Humain, trop humain
Que l’idéal ascétique soit pour Nietzsche essentiellement issu de la haine de la vie, et que la haine de la vie ait partie liée avec la haine de soi-même, voilà ce que nous ne discuterons pas ici.
Par contre nous retiendrons essentiellement que l’homme ne peut se déifier sans se diaboliser en même temps.
Nous avons ici quelque chose d’un peu plus clair que l’affirmation pascalienne « Qui veut faire l’ange, fait la bête », car ce n’est pas à une alternative, mais à une dualité permanente que renvoie Nietzsche.
J’entends bien que pour celui qui n’est pas contaminé par la morale ascétique, l’homme n’est ni Dieu ni Diable. Mais c’est que simplement il peut s’accepter avec ses aspirations morales et ses cruautés toutes ensembles, sans avoir la nécessité de rejeter les unes au profit des autres.
Car c’est cela que Nietzsche nous propose : acceptez vos contradictions, elles font partie de la vie.
Mais une vie sans idéaux, n’est-ce pas la vie d’un pourceau ? Et l’absence d’efforts ne fait-il pas de l’homme un être mou et velléitaire, c’est à dire tout sauf un surhomme…
Peut-on vivre sans ascétisme ? Sûrement pas, et Nietzsche le sait.
Car n’oublions pas que Nietzsche a aussi valorisé l’ascétisme en tant qu’il permet de dresser la bête humaine, qu’il permet de renvoyer à leur place nos craintes et nos tremblements, comme on renvoie un chien fourbe dans son chenil. C’est que, comme le rappelle Deleuze, chez Nietzsche, ce qui importe c’est la force qui s’empare des valeurs. L’idéal ascétique peut être aussi au service du "maître" qui s’élève grâce à lui.
C’est à cette condition que l’homme deviendra non pas un Dieu, mais un « surhomme ».
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