En
toute chose on est plus ardent à la poursuite qu’à la jouissance.
William Shakespeare – Le marchand de
Venise
Pascal
reprendra cette pensée avec le Divertissement, ce besoin de nous détourner (divertere)
de nous-mêmes et de nos défauts en nous absorbant dans des occupations
extérieures, comme celle de la chasse qu’il prend comme un exemple notoire –
exemple que Shakespeare semble bien faire le sien.
Pour
nous, bien sûr, le 18ème siècle et ses Casanova, ses Don Juan etc.
est passé par là : le séducteur lui aussi, aime plus la poursuite que la
jouissance. Et même si il ne crache pas sur la jouissance, on peut dire avec
Kierkegaard que celle-ci n’est que la preuve irréfutable que la prise a été
faite.
Au
fond la question est : est-ce que
Shakespeare nous livre une clé pour comprendre le temps que nous passons à
faire des choses très compliquée – et qui ne servent à rien ?
Enumérons :
-
Passer notre temps à des jeux qui durent la nuit entière pour conquérir un
monde imaginaire contre des ennemis bizarres.
-
Machiner des intrigues au sein de l’entreprise pour arriver à des bénéfices si
maigres que le percepteur aura tôt fait de les confisquer.
-
Trouver l’amour de notre vie et faire avec elle (ou lui) une nichée de
bébés-roses qui blanchiront nos nuits avant de blanchir nos tempes.
Houlà ! Quel sacrilège ! Faire de
la construction d’une vie, de l’élaboration d’une famille un simple moyen
d’oublier notre vacuité ! Et en plus, dire que ça ne sert à rien !
Qui peut prétendre une telle chose, à moins d’être un incurable pessimiste
comme Schopenhauer ?
Quoique…
Quand Shakespeare nous dit que la jouissance – donc la possession – du bien
poursuivi nous est moins agréable que sa poursuite, peut-être pense-t-il que,
ce que nous attrapons, n’est pas exactement ce que nous avons poursuivi.
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Nous avons poursuivi une Sylphide :
...
et nous avons attrapé une mère de famille avec une flopée de lardons.
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