"S'il n'y avait pas la Science, combien d'entre nous pourraient profiter de leur cancer pendant plus de cinq ans ?"
Pierre Desproges - Extrait de Vivons heureux en attendant la mort
La morbidité est le fléau des temps modernes. Des naïfs croient que grâce à la médecine nous allons vivre très vieux et mourir en pleine santé : erreur. Plus on vit vieux, plus on a de « chances » de vivre longtemps en couches culottes, mangeant sa Blédine dans un fauteuil roulant... On demandait un jour au concours d’infirmières de réfléchir à une statistique montrant qu’en 20 ans le nombre des décès à l’hôpital (comparé à celui des décès à domicile) avait augmenté dans des proportions extraordinaires. Une candidate répond : « les gens meurent d’avantage à l’hôpital qu’à leur domicile parce qu’ils sont plus nombreux à mourir malades. C’est un problème de santé publique. » Donc autrefois, on mourait en pleine santé. C.Q.F.D.
Mais sous prétexte de lucidité n’allons pas verser dans un pessimisme encore plus morbide. Pascal comparait l’homme à un condamné à mort attendant dans sa cellule l’heure de son exécution. Mais la vie ne s’épanouit pas sur le terreau de la mort ; l’oubli, force active (Nietzsche), nous propulse vers l’avenir, ou plutôt ouvre le présent sur l’avenir de l’action. Desproges lui-même, son cancer, il en a fait un spectacle, il l’a dominé par son humour, il l’a vaincu en le ridiculisant. Bref il l’a détaché de lui-même, il en a fait une chose. On dit parfois qu’on exorcise nos démons par la parole. Ici on ne les exorcise pas, on les objective, on les englobe pour mieux les dépasser. C’est encore Pascal qui en parle le mieux.
Si le cœur vous en dit, relisez les fragments des Pensées consacrés au « roseau pensant »…
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