"Connais-toi toi-même » et « Sois sage », c’est la même chose.
Platon Charmide
On connaît le paradoxe de la sagesse socratique ; conçue comme savoir indépassable, Socrate, au lieu de lui donner comme objet l’immensité et l’éloignement de l’Univers, lui assigne ce qu’il y a de plus proche de nous-mêmes, à savoir : nous-mêmes.
Science difficile car la proximité est justement ce qui empêche de connaître : où est le miroir qui me permettra de me voir moi-même pour m’étudier à distance d’objet ? Alors qu’Aristote conseillait de trouver un ami, fidèle reflet de nous-mêmes, Platon conseille de se tourner vers Dieu, Ame supérieure qui éclaire les âmes humaines en leur montrant ce qu'elles doivent être.
Car voilà la finesse : la sagesse n’est pas seulement science, elle est aussi art : celui d’agir opportunément par science ; le commandement socratique est au fond une maxime morale. « Connais-toi toi-même pour devenir ce que tu dois être » ; et peut-être même : « Compare donc ce que tu as fait de toi avec ce que tu aurais pu être ». La jeunesse est l’âge des projets les plus fous ; et des abandons encore plus déraisonnables. La sagesse, supposée apanage de la vieillesse est l’âge où la science n’éclaire plus que le chemin … des autres ! Car, si la sagesse et folie vont de paire, la folie du sage ne serait pas n’importe quelle folie : elle serait folie du vieillard qui croirait que le flambeau de la sagesse éclaire sa propre vie, qu’il y a encore un chemin à éclairer devant lui.
Socrate ne cherche donc pas la sagesse pour lui-même, mais pour éclairer les autres. Est-ce plus facile ? En tout cas c’est plus dangereux : qui donc aime savoir ce qu’il aurait dû être ?
A suivre
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