« Pour examiner la vérité, il est besoin, une fois dans sa vie, de mettre toutes choses en doute autant qu'il se peut. »
René Descartes - Règles pour la direction de l'esprit
Quatre points dans cette citation retiennent l’attention :
1 - Il s’agit d’examiner la vérité, donc de vérifier qu’elle mérite d’être considérée comme telle
2 - Qu’on doit le faire une fois dans sa vie
3 - Que ce doute doit affecter toutes choses (= toute connaissance) quelle qu’elles soient.
4 - Qu’on ne peut douter qu’autant qu’il se peut, autrement dit que le doute n’est pas une attitude mais la conséquence de solides raisons.
En cette période de regret et de débat sur l’affaire d’Outreau, l’évocation de la « culture du doute », nous convie à réfléchir au second point de cette citation.
« Une fois dans sa vie » : pas deux, pas trois, une et puis c’est fini. Le doute, il faut en sortir, sinon on est paralysé par l’hésitation, l’incertitude. Est-ce cela qu’on veut dire quand on parle de culture du doute ? Probablement, car comment des juges dont la fonction est de dire la loi pourraient-ils rester dans l’incertitude qu’ils ont pour métier de dissiper ? Imagine-t-on Salomon disant : « J’ai comme un doute, alors je vais couper l’enfant en deux parce que je ne sais pas à qui le rendre.». Bien sûr Salomon ne savait pas à qui le rendre, mais son célèbre jugement n’était qu’une ruse pour forcer la vérité à se dévoiler, autrement dit pour sortir du doute.
Douter, c’est douter d’abord de l’évidence, voilà ce que Descartes nous enseigne. On doute tant qu’on peut, tant qu’une preuve irréfutable ne nous oblige pas à y renoncer. On doute donc pour prouver.
Prouver, c’est prouver les preuves et, comme on le sait, en matière judiciaire les aveux ne sont pas preuves (sans quoi la torture serait toujours d’actualité). Quand sait-on qu’on a rencontré la preuve qui n’a plus besoins d’être prouvée ? Quand elle résiste au doute, car la vérité, c’est ce qui s’impose à qui ne veut pas la croire. Dans les affaires criminelles les preuves matérielles jouent à peu près ce rôle tant qu’elles existent ; et puis après, … on retrouve l’intime conviction des magistrats. Est-elle probante ?
Descartes quant à lui, avait cru nécessaire d’en appeler à l’infinie bonté divine pour éclairer le chemin de la vérité. Il sera difficile de faire mieux.
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