Friday, November 10, 2006

Citation du 11 novembre 2006

En lutte avec elles-mêmes et en guerre les unes avec les autres, elles [les sociétés humaines] cherchent visiblement, par le frottement et par le choc, à arrondir des angles, à user des antagonismes, à éliminer des contradictions, à faire que les volontés individuelles s'insèrent sans se déformer dans la volonté sociale et que les diverses sociétés entrent à leur tour, sans perdre leur originalité ni leur indépendance, dans une société plus vaste

Bergson - La conscience et la vie (1911)in l’énergie spirituelle

Ah ! … La guerre ! Irremplaçable et jamais finie.. (1)

Peut-on commémorer la Victoire sans faire l’éloge de la guerre ? Du moins de celle qu’on a gagnée (vous connaissez la plaisanterie du voyageur qui rentre d’Angleterre et qui dit : « Les anglais sont bizarres : il y a plein de noms de défaites dans les rues de Londres : Waterloo, Trafalgar.. »). Grâce à Bergson célébrons toutes les guerre, mêmes celles qu’on a perdues ; ou si vous préférez la guerre en général.

Dans cette conférence (si opportunément prononcée trois ans seulement avant de le déclenchement de la Grande Guerre que nous célébrons aujourd’hui) Bergson compare la guerre à la mer qui roule les galets sur la plage, les polissant peu à peu et, par les frottements, produisant des formes qui leur permettent de rester bien stables sur le rivage où ils ont finalement échoué. Transposez : les Etats-Nations se font la guerre parce que chacun veut annexer le territoire du voisin ; le guerre seule peut amener, peu à peu, chaque pays à déterminer et à accepter ces frontières (2). Au fond, ce que veut dire Bergson, c’est que la guerre est nécessaire pour qu’il y ait la paix ; et non pas, bêtement, parce que sans la guerre on ne saurait pas ce que c’est que la paix… Mais bien parce que l’équilibre qui y caractérise les rapports entre les Etats ne peut être atteint qu’à la suite d’un tel affrontement ; un peu comme, dans la horde sauvage, les jeunes mâles acceptent d’obéir au chef parce qu’ils ont fait l’épreuve de se force et de sa férocité.

Reste que Bergson imagine que la guerre aboutit à une communauté de sociétés, une sorte de fédération, et il ajoute même que les sociétés s’intègrent sans perdre leur originalité ni leur indépendance. Où est-ce qu’il a vu ça, Bergson ???

(1) Pour un autre éloge de la guerre, voir citation du 8 mai.

(2) Sur le rapport diplomatie/guerre voir le message du 23 juillet

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