Des deux côtés mon mal est infini.
Ô Dieu, l'étrange peine !
Faut-il laisser un affront impuni ?
Faut-il punir le père de Chimène ?
Corneille - Le Cid (Acte I, scène 6)
Débat : la quelle de ces deux situation rejetez-vous ?
« - Bonjour madame, voici deux embryons, l’un qui est sain, l’autre porteur d’une maladie génétique bien douloureuse et bien invalidante. Le quel choisissez vous ? - Monsieur, ces embryons ne sont pas seulement mes enfants, ce sont aussi les enfants de Dieu. Je les prends tous les deux. »
« - Madame, monsieur, les progrès de la science permettent aujourd’hui de sélectionner les enfants que vous désirez avoir. Finissez-en avec le hasard ! Ne vous en remettez plus à la nature pour faire des enfants ! C’est qui Huxley avait raison : le meilleur des mondes est pour aujourd’hui. »
Je vais peut-être vous frustrer mais je refuse d’entrer dans ce débat. Tout le monde veut - exige devrais-je dire - une réponse sûre et certaine, qu’il pourrait adopter, et qui lui permettrait de considérer l’affaire comme close. Or voilà : cette affaire-là, elle ne sera jamais close. L’Eglise est irresponsable de culpabiliser les pauvres parents qui essayent de ne pas donner naissance à un enfant handicapé. Mais elle a raison lorsqu’elle souligne que la sélection des embryons est une pratique condamnable parce qu’elle fait l’impasse sur le caractère sacré de la vie humaine (2). Comment choisir sans être en faute ?
Ma thèse c’est la suivante : le dilemme devant le quel on se trouve ici est le signe même de la vie morale : la stance du Cid, donnée en citation, elle là pour le rappeler. Lorsque je choisis l’une des deux positions, c’est avec la conscience aiguë du divorce que j’instaure entre mes principes et la réalité - ou : entre la réalité et mes principes. Le dilemme est solidaire de la condition humaine, nous vivons dans un monde qui n’admet pas nos principes, mais nous refusons de vivre sans ces principes
(1) Dilemme - Nécessité dans laquelle se trouve une personne de devoir choisir entre les deux termes contradictoires et également insatisfaisants d'une alternative.
(2) A condition d’admettre que l’embryon soit une personne = un débat peut en cacher un autre.
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