Avant notre venue, rien de manquait au monde ; après notre départ, rien ne lui manquera.
Omar Khayyâm
Philosophe et mathématicien du XIème siècle dans l’empire ottoman, Khayyâm est connu pour avoir célébré les femmes et le vin ; un épicurien musulman quoi… Ici il nous interpelle sur l’importance de notre vie : si nous n’avons pas à croire que le monde boitait avant notre venue, nous n’avons pas non plus à croire qu’il souffrira de notre absence. Autrement dit, l’histoire ne s’intéresse pas aux individus, elle ne connaît que les masses ; le grands hommes n’existent que pris dans cette pâte et façonnés par l’évolution qui les a rendus possibles. Tout le reste n’est que prétention.
Pour ceux qui s’intéressent au sens de la vie, le message est également limpide : le sens de ta vie est dans ta vie. Pas avant, bien sûr, et surtout pas après. Le sacrifice du héros, l’ambition du chef d’Etat, la patience du paysan qui agrandi son domaine, tout cela n’est qu’illusion : nos enfants n’en ont rien à faire de ce que nous avons été, et s’ils apprécient ce que nous avons fait pour eux, c’est à leur façon qui ne coïncide peut-être pas avec le message que nous avons voulu leur transmettre ; ils ont autre chose en tête que de rendre un culte à leurs ancêtre. Ou plutôt, si : lorsqu’ils leurs rendent un culte, c’est qu’ils en ont fait des Dieux, c’est à dire tout autre chose que ce qu’ils sont réellement.
Mais en même temps, si rien ne dépasse de la durée de cette existence, ce que nous faisons n’a d’autres conséquences que celles que nous pouvons observer. Plus d’enfer à craindre ; plus de paradis à espérer. L’enfer et le paradis sont sur cette terre, à nous de savoir nous orienter.
Car bien sûr, il est possible de croire que le sens de la vie soit après le vie. Mais c’est dans un autre monde que s’inscrit cet après, dans L’autre monde ! Encore faut-il qu’il existe. Voyez là dessus le pari de Pascal ; et vous remarquerez que, dans le pari, l’alternative est entre jouir de la vie en renonçant (le terme est impropre je sais) à l’autre monde, ou bien renoncer à une vie de jouissance et espérer en une vie meilleure dans l’au-delà.
Nunc est bibendum...(1)
(1) Nunc est bibendum, nunc pede libero / pulsanda tellus, nunc Saliaribus / ornare puluinar deorum / tempus erat dapibus, sodales. [Buvons, amis, buvons, sans que rien nous arrête ; /Ebranlons à l'envi la terre sous nos pas ; /Pour la table des Dieux il est temps qu'on apprête / De somptueux repas.] Horace, Odes I, XXXVII)
No comments:
Post a Comment