Il [Protagoras] dit en effet, n’est-ce pas, que l’homme est la mesure de toutes choses, de l’existence de celles qui existent et de la non-existence de celles qui n’existent pas.
Platon -Théétète
L’homme est la mesure de toutes choses…S’agit-il d’anthropocentrisme ? (1) Peut-être, mais on laissera cet aspect de côté comme non pertinent dans le contexte, et secondaire pour notre propos. En réalité, il s’agit de relativisme, et plus particulièrement du relativisme épistémologique.
Relativisme épistémologique : La variété des opinions résulte du caractère conventionnel de la connaissance qui n’a d’autre réalité que de fixer arbitrairement des rapports entre des phénomènes perpétuellement changeants (cf. Héraclite) par un concept tenu pour vérité. Dans un autre contexte, on considérerait plutôt que Protagoras considère la vérité comme un rapport entre la pensée et la nature : elle ne peut donc être que changeante. C’est donc le sens de cette citation. Mais on serait tenté aujourd’hui de la lire autrement : je veux parler du relativisme moral.
Relativisme moral : faute d’une source transcendante qui les fonde, toutes les valeurs se valent. Il y a alors une pluralité de morales entre les quelles le choix est nécessairement arbitraire et subjectif. L’homme est la mesure de toutes choses signifie alors que l’individu est maître de ses évaluations, donc de ses choix. On devine le danger d’une telle croyance, qui d’ailleurs est très répandue : je connais beaucoup de gens qui ne comprennent pas que les opinions racistes ou antisémites ne soient pas couvertes par la liberté de penser et de dire ce que l’on veut. Comment affronter ce relativisme ?
De même que Popper propose de sortir du relativisme épistémologique par la mise en compétition des différentes hypothèses, de même on pourrait considérer les valeurs morales à partir des effets des actes qu’elles justifient. C’est au fruit qu’on juge l’arbre, c’est à leurs conséquences qu’on évalue les valeurs.
Mais je serais tenté de remonter un cran plus haut : plutôt que les conséquences, jugeons le principe qui gouverne le rapport entre nos buts (les valeurs) et nos moyens (les actions) : des religions jusqu’aux idéologies les plus variées, on bute sans cesse sur les mêmes horreurs. Dieu à servi à tout bénir (voir citation du 28 janvier) ; Marx et Lénine aussi. Ne faudrait-il pas dire alors que c’est la croyance que le bonté de la fin justifie n’importe quel moyen qui est la véritable erreur ?
Cette erreur porte un nom : c’est le fanatisme.
D’ailleurs, le fanatisme n’est pas une erreur : c’est une faute.
(1) Tout ce qui existe, n’existe que pour l’homme et ne prend de sens que par rapport à lui.
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