Sunday, November 26, 2006

Citation du 26 novembre 2006

Une idée fausse, mais claire et précise, aura toujours plus de puissance dans le monde qu'une idée vraie, mais complexe
Alexis de TOCQUEVILLE - De la Démocratie en Amérique, I (1835)
Tocqueville n’emploie pas le mot de propagande qui n’avait pas ce sens à l’époque (1) : mais c’est bien de ça qu’il est question. Toute fois, la propagande étant un vilain mot, on évitera de l’utiliser ici, et on le remplacera par le terme plus consensuel de « communication ». Mais, bon : c’est pourtant bien ça qu’on parle ici.
La propagande est une forme de l’art de convaincre. Comment convaincre ? Le seul procédé devrait être de dire la vérité. Voyez Spinoza( Pensées métaphysiques) : « – Les propriétés de la vérité ou de l’idée vraie sont :
1° Qu’elle est claire et distincte.
2° Qu’elle lève le doute »
La propagande a donc pour objectif de se substituer à la vérité pour provoquer cette adhésion. Pourquoi et comment ? Que faut-il en conclure ?
Pourquoi ? Parce que c’est plus simple de convaincre avec une fausseté claire qu’avec une vérité obscure. Contre l’idée claire et distincte de Spinoza et de Descartes ? Pas du tout : chez ces philosophes, la vérité n’apparaît qu’à celui qui a refait le cheminement qui mène à cette évidence (ex. : refaire la démonstration du théorème prouvant que les 3 angles d’un triangles sont égaux à 2 angles droits le rend évident). Bref, si vous ne refaites pas le cheminement, vous n’y comprenez pas grand chose. En revanche, l’idée « claire » assénée comme une évidence fera le même effet sans impliquer la vérité.
Comment ? La « langue de bois » en est un exemple bien connu. Il s’agit de remplacer les choses par des mots comme s’ils suffisaient à prouver l’existence de cette réalité. Ce qui compte, c’est que ce soit plus simple - et plus avantageux, propagande oblige.
Que faut-il en conclure ? Pascal disait qu’il est bon d’avoir une erreur commune qui réunisse les hommes plutôt que l’incertitude qui les disperse selon des hypothèses innombrables. Mais suivant le même raisonnement, Nietzsche affirme que notre goût pour la vérité tient justement à la sécurité de l’immuable : ce qui est vrai est considéré comme vrai pour tous et à tout jamais. Ce qui compte après tout c’est la concorde : que nous soyons tous d’accord. Et non de savoir sur quoi on est d’accord…
Quoi ? Vous n’êtes pas d’accord ???
(1) Propagande désignait encore en 1830 une association religieuse ou politique ayant pour but de diffuser une doctrine. C’est plus tard, par généralisation, que propagande a servi à désigner l’art de diffuser une doctrine.

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