Les diplômes représentent un obstacle à la liberté de l'éducation, faisant du droit de partager ses connaissances un privilège réservé aux employés des écoles.
Ivan Illich - Une société sans école
J’ai longtemps hésité à donner cette citation, considérant qu’en cette époque d’autoritarisme et de retour à l’ordre, cette évocation d’un thèmes soixante-huitard, et qui plus est, dans une perspective dont on se plaît à souligner habituellement l’échec, serait donner du grain à moudre à ceux que j’exècre.
Et puis, au diable la pusillanimité. L’idée est féconde, du moins il me semble. Vérifions.
D’abord, éliminons les erreurs d’interprétation.
1ère erreur : Il ne s’agit pas de dénigrer les diplômes en disant que ceux qui réussissent dans la vie n’ont pas forcément les diplômes requis : nous avons eu un ministre de l’Education nationale qui n’avait que son certificat d’études.
Non, il s’agit de montrer que l’obtention du diplôme créait des conditions peu favorables à l’acquisition d’une véritable culture.
2ème erreur : réduction du sujet aux diplômes obtenus par les élèves. Et certes, il y a pourtant quelque chose à en dire.
Voyez ces élèves de terminale : ils calculent leurs coefficients du bac pour savoir combien il leur faut assurer dans chaque discipline pour être reçu. Nul dans une matière à faible coeff ? Au lieu de chercher à surmonter cette difficulté, essayons de grappiller un point de plus en physique - coeff. 6.
Voyez ce prof : - Je suis là pour remplir une mission. Faire que tous mes élèves aient leur examen. Après qu’ils aiment ou pas ce que je leur enseigne m’importe peu, parce que je le leur enseigne justement non pas parce que c’est essentiel à connaître, mais parce que c’est dans le programme de leur examen.
Bref, ça non plus ce n'est pas très bon pour la culture.
- Soit, mais Illich, lorsqu’il parle des diplômes, il parle de ceux qui sont requis pour enseigner. Il a donc d’autres dragons à pourfendre.
De quoi parte-t-il quand il évoque la liberté de l'éducation ? Il parle du droit de partager ses connaissances. Ce droit suppose un privilège : celui d’être un prof estampillé, reconnu par les autorités. Vous qui n’êtes pas prof, vous avez pourtant des idées sur la vie, vous avez lu Spinoza, vous voulez en parler, mieux, vous voudriez aider votre petit neveu à réviser sa philo ? Exercice illégal de la philosophie ! Crime et délit d’un incompétent qui n’a pas été intronisé par le rite initiatique des concours d’enseignement.
Et c’est vrai, mais si Illich a raison, c’est l’apprentissage qui est la vérité de l’enseignement, je veux dire que l’homme de métier, l’artisan est le mieux placé pour transmettre son savoir. Et que ce savoir est bien plus large que son métier : qu’est-ce qui empêcherait un maçon d’enseigner la géométrie ?
Mais si enseigner était aussi un métier ?
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