Wednesday, July 09, 2008

Citation du 10 juillet 2008

L'avantage des gens qui n'ont pas le baccalauréat, c'est qu'ils le préparent leur vie durant.

Günter Grass – l’Atelier des métamorphoses

Oui, notre ami Kévin a eu son bac…enfin ! Ce sont surtout ses parents qui sont soulagés ; lui, il va devoir affronter d’autres responsabilités, parce qu’il va travailler pendant ses vacances. Quant au BTS qu’il commencera à préparer à la rentrée nous attendrons celle-ci justement pour recueillir ses impressions.

Ceux qui ont loupé leur bac ruminent leur vie durant cet échec…

Avez-vous remarqué que les gens qui n’ont pas fait d’études (= qui les ont interrompues avant leur terme) traînent toute leur vie cette blessure ? J’entends bien que certains en profitent pour affirmer avec fierté leur réussite « malgré tout », mais la plupart sont comme monsieur Jourdain qui en veut à ses parents de ne pas l’avoir fait étudier.

Quant à ceux qui ont fait des études, leur diplôme, qui ne devrait pas refléter plus que leur niveau lorsqu’ils l’ont obtenu, leur sert durant la vie entière de quartier de noblesse. Souvent même leur position sociale fait appel à lui. Je ne veux pas dire que l’ingénieur va, sa vie durant se pavaner dans son « bac-plus-5 », mais supposez que cet ingénieur sorte de Centrale, des Mines, ou encore de l’X….

Mais prenez un exemple plus frappant : les professeurs qui sont répartis en « vacataires », « professeurs des écoles », « certifiés », « agrégés » (1). Ces différents statuts là encore ne reflètent en principe qu’un niveau d’études (voire même simplement un type d’études) à un moment donné de la vie de ces gens ; niveau d’études, et même pas de compétence professionnelle, qui ne se révèlera qu’après quelques années d’exercice. Hé bien leur vie professionnelle durant, les agrégés peuvent afficher avec fierté leur qualité d’agrégés (= mépriser les autres), on les y invite même. J’ai connu un lycée parisien (2) où il y avait deux salles des profs : l’une réservée aux agrégés, l’autre ouverte aux autres.

Et je ne parle pas des anciens de l’ENS (Ulm évidemment).

Pour me résumer : ce que nous avons réussi à être dans notre jeunesse nous détermine la vie durant, quand bien même nous serions amenés à changer beaucoup plus après qu’avant.

– Que n’ai-je étudié plus tôt, disait monsieur Jourdain. – Hé bien, étudie donc !

(1) Jusqu’à maintenant, la fonction de professeur est celle où, moins on assume d’heures de cours, et mieux on est payé. Va falloir que ça change !

(2) C’était Janson de Sailly. Je parle à l’imparfait parce que je crois que tout cela a disparu…dans les faits mais peut-être pas dans les têtes.

2 comments:

Djabx said...

Je vous propose une expérience que je trouve intéressante.
Faite les petites annonces pour un appart, une maison, un boulot, discuter avec un coiffeur, demandé un prêt à un banquier, les magasins pour un costume (c'est pas le costume, c'est surtout le temps à parler qui est important) etc. (presque n'importe quoi qui permette de parler avec un interlocuteur pendant assez de temps).

Au cours de la discutions avec votre interlocuteur, il devrai vous demandez ce que vous faites dans la vie: ni une ni deux dites un truc genre "ingénieur en informatique" (ce qui est mon cas perso) (je pense que ça marche aussi avec acteur, politicien etc) et regardez leurs réactions.

Je suis toujours étonné du regard que les gens vous portent après ça; comme si vous étiez à part, venu d'un autre monde.
En ce qui me concerne, je n'aie pas l'impression d'être un nanti, même si je ne me plain pas de mon sort, ni d'être beaucoup plus intelligent que ma coiffeuse par exemple.

Tout ça pour dire que je suis bien d'accord avec vous sur le fait qu'on porte sur nous le chemin de nos études, mais que notre environnement nous aide aussi beaucoup à cela...

Jean-Pierre Hamel said...

Je suis toujours étonné du regard que les gens vous portent après ça; comme si vous étiez à part, venu d'un autre monde.

Pour ma part je ne dis jamais à un inconnu que je suis prof de philo. Surtout pas. Parce qu’aussitôt un mur de glace tombe entre lui et moi, à moins que ce ne soit une réaction affective – bonne ou mauvaise – qui surgit hors de situation.
Quand on me demandait quel est ma profession (avant que je ne sois retraité), je répondais obstinément : « Enseignant ». Point final.
Réconforté de savoir que cette situation existe aussi pour les ingénieurs.