Plus il y a de lois, et plus il y a de voleurs
Lao-Tseu
On comprendra qu’il ne s’agit pas ici de dire avec ironie : si on veut supprimer les délits, arrêtons de les établir. Que le viol ne soit plus condamné, et on n’aura plus de violeur en prison ; mais on en aura toujours autant dans les maisons. Non, il s’agit bien plutôt d’évoquer l’hypothèse selon laquelle les interdits nés de l’obsession de la sécurité engendrent eux-mêmes l’insécurité. Ils sont comme on dit aujourd’hui contreproductifs.
Chaque loi formulant un interdit engendre des hommes pour lui désobéir : selon Durkheim la tendance à désobéir aux lois est une constante de la nature humaine, en sorte que le délit est un phénomène normal, du moins quand il reste dans des proportions raisonnables.
Si à chaque interdit correspond un certain lot de délinquants, alors comme le dit Lao-Tseu, plus il y a de lois, et plus il y a de voleurs.
Suffirait-il de dépénaliser certains actes pour voir les hommes se détourner de les accomplir ? La tentation est grande en effet de conclure sur la maxime chinoise : pour supprimer le vol, supprimons les lois qui l’interdisent.
Toutefois, comme nous l’avons remarqué, on peut produire toutes sortes d’exemple de délits qui ne sont pas poursuivis dans certains pays, mais qui n’en sont pas moins commis. Que l’Etat ne poursuive aucun voleur n’empêchera pas qu’ils détroussent les gens. Seuls les anarchistes pourraient croire cela.
Voilà, j’ai lâché le mot : si Lao-Tseu n’est pas anarchiste (bizarre formule d’ailleurs), sa formule l’est – du moins pour nous. Si c’est la loi qui fait le voleur et non le voleur qui justifie la loi, c’est que l’homme est fondamentalement bon, et que seule la contrainte le pousse à faire le mal.
Je dirai donc que la maxime de Lao-Tseu commet une petite erreur : celle de faire comme s’il n’y avait qu’une cause au délit.
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