La vertu est difficile à découvrir ; elle demande quelqu'un qui la dirige et la guide, les vices s'apprennent même sans maître.
Sénèque – Questions naturelles
Un peu de morale en passant : de la morale comme
autrefois, celle qui se prodigue à coup de règle – sur les doigts…
Car c’est bien cela : les vices sont spontanés,
personne n’a besoin d’apprendre à faire souffrir un petit animal, ni à mettre
la main sous la jupe de la copine. Par contre attention à ne pas se faire
pincer : les maitres de vertu n’y vont pas de main-morte !
Mais (comme dit la pub) ça, c’était avant. Depuis mai 68,
les vices et les vertus sont passés à la trappe, les maitres et les corrupteurs
aussi. Ne restent que les slogans qui nous encouragent à acheter sans aucune
retenue ce qui nous fait jouir, et à payer pour éviter les embarras qui
viennent après.
Désirs et plaisirs dansent la sarabande et leur sabbat de
sorcière dure toute l’année.
Vite ! Rétablissez les leçons de morale à
l’école ! Des Écoles sans Dieu, des
Maitres sans foi, débarrassez-nous Seigneur !
o-o-o
Stop ! N’allons
pas réclamer le retour du prêtre qui enseigne la morale à l’enfant de cœur en
le caressant sur ses genoux !
- Relisons plutôt la phrase de Sénèque : il nous
faut dit-il quelqu’un pour nous diriger
vers la vertu, quelqu’un qui puisse apparaitre comme un maître ;
celui qui aurait une autorité morale, et non pas la férule du censeur. Oui,
mais qui ?!
Regardons bien autour de nous : il est des personnes
qui ont une autorité morale « naturelle », devant qui nous rougirions
de nous montrer veules ou malhonnêtes. Qui s’imposent sans avoir à commander,
qui – comme le dit Lao-tseu – « enseignent sans paroles et sont utiles
sans actes ». Cela c’est exactement ce que Bergson nomme « l’appel du
héros » : ce qui caractérise selon lui la « morale
ouverte » (par opposition à la « morale fermée » qui s’enseigne
justement à coups de règle sur les doigts).
Rappelez-vous de l’autorité qu’avait l’Abbé Pierre :
il faisait trembler même les Présidents de la République. Et son Association était
laïque.
Hélas ! L’abbé Pierre est au Paradis et personne n’est venu le remplacer… On
devine que les héros de la morale ne courent pas les rues de nos jours. Mais ce
n’est pas non plus nécessaire : on trouve un peu partout des gens qui
n’ont pas le profit (qu’il soit personnel ou collectif) pour seul horizon. Des
gens qui tendent une main à ceux qui souffrent sans demander à qui appartient
cette main.
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