André Gide – Les nourritures terrestres
Familles je vous hais ! Connaissez-vous une citation plus célèbre que celle-ci ? Il y a quelques dizaines d’années (en mai-68 par exemple), elle était le lieu commun qui expliquait la crise de l’autorité. Les jeunes qui s’engageaient chez les maos ou qui se livraient à la consommation de marie-jeanne, voire même se débauchaient avec toutes les Marie-Jeanne, Marie-Chantal et les autres qu’ils rencontraient, le faisaient parce que c’était défendu chez leurs parents.
Seulement voilà : ce n’est pas tout à fait ça que voulait dire Gide. Possessions jalouses du bonheur, la famille est haïe non pas par celui qui en fait partie, mais par celui qui reste à l’extérieur, et qui en est exclu. Amour et bonheur font partie du lot que la famille réserve à ses membres. Mais elle est aussi refus du partage, refus de l’ouverture aux autres. Heureuse, oui, mais d’un bonheur égoïste.
Voilà : non seulement ça change radicalement le sens supposé de cette condamnation de la famille, mais on pourrait encore se demander si ceux qui écrivaient Familles je vous hais ! sur les couvertures de leurs cahiers d’écoliers, auraient accepté ce partage du bonheur que regrette Gide.
Séquence nostalgie : il y a de ça bien longtemps, mes chers enfants, je discourais devant mes élèves, exposant la thèse de Wilelhm Reich sur la jalousie, forme d’amour pervertie par le capitalisme et son obsession de l’appropriation ; il en résultait que l’union libre, entendue comme communauté des femmes ou des hommes, était l’aboutissement de la libération politique de la vie amoureuse. Là dessus un de mes élèves, qui était très amoureux de sa voisine de classe est venu me demander si je croyais sérieusement à ce que je venais de dire. Il était stupéfait qu’on puisse imaginer que l’amour ne soit pas exclusif.
Finalement la famille, c’est un couple élargi
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