Michael Douglas a raison de dire en 2010 : « Greed is not just good, it's legal.” [La cupidité n’est pas seulement bonne, elle est légale.]
Marc Fiorentino pour La Tribune - 09/02/2011
Les financiers se mêlent maintenant d’avoir des jugements moraux ? En tout cas, ils se soucient plus encore de légalité que de moralité.
Décryptons :
- Greed is good : si ça semble aller de soi, c’est sans doute parce qu’on a affaire à un financier anglo-saxon. Dans ces pays, si j’en crois John Rawls, les théoriciens du droit soutiennent que pour comprendre le fonctionnement de la société il suffit de deux principes de base : les hommes sont égoïstes et ils sont rationnels.
Ajoutons simplement que, dans ce contexte, les hommes sont égoïstes quant aux fins, et rationnels quant aux moyens.
- Greed is legal : rappelons que cette réplique est placée dans un film consacré à Wall street (1), et que l’action se passe en pleine crise des subprimes, ce qui nous renvoie à la déréglementation des marchés et la légalisation des prises de risques par les traders.
Ce qui nous renvoie aussi à ce qu’on appelle encore aujourd’hui le libéralisme, avec cette idée que ce qui est légal, c’est n’est pas ce qui est explicitement autorisé par la loi, mais simplement ce qu’elle n’interdit pas.
Exemple :
- Ai-je le droit de dépouiller mon voisin de ses biens ? Non, parce que la loi interdit le vol.
- Bon ; mais est-ce que j’ai le droit de lui vendre à crédit quelque chose, sachant qu’il ne pourra pas payer les traites et cela, tout en exigeant un hypothèque sur sa maison ? Réponse oui, parce que ça, aucune loi ne l’interdit.
On me dira peut-être que c’est la loi de Wall street et que ça n’a pas cours ailleurs.
Vous êtes libre de l’espérer, mais vous risquez d’être déçu. C’est qu’il ne faudrait pas confondre les préceptes de la morale, que tout le monde connaît - mais que bien peu appliquent, et les obligations juridiques qui sont impératives, mais bien peu fréquentes.
Essayez de les superposer : vous allez voir que les deux ne se recouvrent pas tout à fait.
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(1) Il s’agit de “Wall Street : money never sleeps”. J’ajoute que la bande annonce du film traduit « greed » par “avidité”. Je préfère quant à moi « cupidité », parce qu’il ne s’agit pas de sexe ni de tarte au chocolat, mais bien de dollar.
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