On pourrait reconnaître aisément cette vérité à peine entrevue par le penseur, que, depuis l'huître jusqu' à l'aigle, depuis le porc jusqu'au tigre, tous les animaux sont dans l'homme et que chacun d'eux est dans un homme.
Victor Hugo – Les Misérables
Dona Sol (à Hernani) – Vous êtes mon lion superbe et généreux!
Victor Hugo – Hernani III, 4
Alors comme ça Hernani n’est pas seulement un lion, mais aussi une huitre ? Non seulement un aigle, mais aussi un porc ? Est-il permis de souiller ainsi un héros tel que lui ?
Après tout, l’auteur est tout puissant, ce qu’il veut, il faut que cela soit. Ça n’empêche – il y a quand même bien des problèmes à résoudre :
- Comme par exemple celui-ci : si c’est dans chaque homme concret que toute cette arche de Noé doit trouver place, où donc loger tout ça ? Et comment ces animaux se partagent-ils le corps humain ? Par exemple : l’aigle et le lion dans le cœur, le renard dans la tête, le porc dans le ventre – voire même dans le bas ventre… (1)
Oui, mais l’huître : vous la mettez où ?
Ce qui nous mène à une autre difficulté : admettons que la grandeur de l’homme soit qu’il récapitule la totalité de la Création et qu’Adam ait en lui tous les animaux, tous les êtres vivants qu’il a nommés devant le Seigneur (Genèse, 2,19-20). Comment peut-on penser la synthèse de tous ces êtres dans un unique être humain ? Y a-t-il un moyen de mettre bout à bout toutes ces espèces ? Peut-on supposer que l’homme soit un kaléidoscope animal, qu’il soit le matin un aigle, à dix heures un lion, à midi un chien et le soir un porc ?
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(1) Cette fiction est plus sérieuse qu’il n’y paraît : dans l’antiquité, les grecs pensaient que dans l’organisme humain, chaque organe était en réalité un petit animal, le quel était susceptible de se déplacer à l’intérieur de corps. C’est ainsi qu’ils expliquaient l’hystérie féminine : l’animal-utérus se serait alors déplacé et fixé au niveau du cerveau.
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